N’ayons pas peur d’assumer l’héritage d’un patrimoine moral et religieux qui nous rappelle cette vocation spéciale à la sainteté qui nous est propre.
Lundi 25 août, nous célébrons dans toute l’Eglise Saint Louis, roi de France, dont nous fêtons cette année le 800ème anniversaire de la naissance.
Comment se fait-il qu’un roi du 13ème siècle soit honoré, non seulement en France – ce qui est bien compréhensible- mais aussi en Asie, en Afrique, en Amérique… partout dans le monde ? C’est parce que nous avons avec Louis IX un modèle éminent, exceptionnel de chrétien, laïc, ayant exercé les plus hautes fonctions politiques, civiles et militaires dans un esprit évangélique.
Chef d’Etat soucieux de justice et de paix au service des pauvres et des malades, père attentif à élever ses onze enfants en vrais chrétiens, Saint Louis a également renforcé les liens entre le royaume et les chrétiens d’Orient. Il se regardait comme responsable de leur défense, de leur survie de leur protection.
Donnant des enseignements à son fils Philippe, le futur Philippe III le Hardi, Saint Louis écrivait : « Cher fils, je t’enseigne premièrement que tu aimes Dieu de tout ton cœur et de tout ton pouvoir, car sans cela personne ne peut rien valoir » – et de poursuivre- « Tu dois te garder de toutes choses que tu penseras devoir lui déplaire… et spécialement tu dois avoir cette volonté que tu ne fasses un péché mortel pour nulle chose qui puisse arriver… ».
Cette horreur du péché, Louis IX la conserva toute sa vie : « mieux la maladie, la mort, que le péché »disait-il à son entourage, notamment à son ami Joinville.
Quand, prisonnier des musulmans, on le menaça des pires tortures, il préféra cette éventualité à celle de prononcer une parole qu’il jugeait blasphématoire, alors même que des proches étaient déjà soumis à la torture dont le Patriarche de Jérusalem lui-même ! Cette rectitude morale, dans toutes les circonstances de la vie, impressionnait ses contemporains, et ses ennemis eux-mêmes en étaient touchés si bien que les égyptiens qui l’avaient capturé lui proposèrent d’être leur souverain !
L’amour de Dieu se manifesta notamment dans la justice de Saint Louis qui est peut-être la vertu qui a le mieux traversé les siècles. Bien sûr il y a l ‘image du Souverain rendant les jugements sous le chêne de Vincennes, mais, beaucoup plus que cela, c’est toute une réforme qui assainit en profondeur la justice du royaume.
Dans les mêmes conseils à son fils, Louis IX disait : « Cher fils, s’il advient que tu deviennes roi, prends soin d’avoir les qualités qui conviennent à un roi, c’est-à-dire que tu sois si juste que , quoiqu’il arrive, tu ne t’écartes pas de la justice…Soutiens de préférence le pauvre contre le riche jusqu’à ce que tu saches la vérité, et quand tu la connaîtras, fais justice… Si tu apprends que tu possèdes quelque chose à tort, rends la tout de suite, quelque grande soit cette chose, terre, deniers ou autres bien »
Un jour, alors que les grands du royaume et son épouse, Marguerite de Provence, faisaient pression pour lui demander l’adoucissement d’une peine infligée à une femme de haute noblesse, le roi resta ferme ; il lui fut alors demandé que la sentence soit exécutée dans un autre lieu, eu égard à son honneur, le roi maintint sa décision : «il n’y a pas de passe-droit en justice». Il fît de même pour son frère Charles d’Anjou, dans un arbitrage pour l’attribution du comté du Hainaut.
Admirant son esprit d’équité, les souverains étrangers, le Pape lui-même lui demandaient d’être l’arbitre de leurs désaccords, ce qui épargna bien des guerres. Si les adversaires avaient tous deux de bons motifs pour faire valoir leurs droits, Saint Louis savait rechercher le bon compromis.
Il semble que jamais la justice n’a été aussi bien rendue dans le royaume qu’au cours de la deuxième partie de son règne.
Son amour, son service des pauvres est également exemplaire, tant par les œuvres établies : construction de l’ « Hôtel Dieu », de l’hospice des Quinze-Vingt pour les aveugles, de dispensaires…que par le temps qu’il prenait pour servir lui-même les pauvres, les laver, les faire manger ; il se faisait leur serviteur et demandait leur prière.
Les liens de la France avec les chrétiens d’Orient doivent également beaucoup à Louis IX.
Après l’échec de sa première croisade (la 7ème), le souverain resta quatre ans en terre sainte pour protéger les territoires, racheter les esclaves chrétiens, notamment les enfants que l’on avait déjà contraint à embrasser l’Islam. Il restaura et renforça de nombreuses places dévastées par les Sultans. Pour Saint Louis les chrétiens d’Orient, chez eux depuis le 1er siècle de notre ère, devaient pouvoir vivre sans être soumis au statut inférieur de dhimmi.
Il est bien sûr impossible de résumer en peu de temps la vie de Saint Louis, mais ces quelques points évoqués – aide à nos frères chrétiens d’Orient, profonde éducation chrétienne de la famille, sens de la justice et amour des pauvres- sont des sujets toujours d’actualité. Nous pouvons donc prier Saint Louis pour nos frères chrétiens, notre pays, nos familles qui en ont bien besoin.
N’ayons pas peur de plonger nos racines dans cet humus évangélique constitué par les saints de nos contrées. Nous sommes les héritiers d’un patrimoine moral et religieux dont nous devons nous nourrir et que nous devons faire fructifier.
Le Père Amis Ama, irakien, et le Père Samir Nassif, libanais, que nous avons eu la joie de recevoir dans notre paroisse ces dernières années, nous rappelaient cette vocation spéciale à la sainteté qui nous est propre.
Amen