Année 2024-Homélie pour la messe de la nuit de Noël (EA).

15994954 - christmas and bible with blurred candles light background

Les signes d’un Dieu.

Les bergers restèrent un moment eux aussi extatiques, remplis de joie, rassasiés d’amour et d’un commun accord décidèrent d’aller adorer l’Enfant nouveau-né près de Bethléem. Ils se mirent en mouvement; ils couraient, l’amour les poussait, le désir de voir le Messie les animait; ils allaient droit vers les grottes de refuge, car seul là pouvait se trouver une mangeoire.

____________________________________________

La nuit de Noël, aujourd’hui, l’Eglise lit, dans les deux premières messes (celle de minuit et celle de l’Aurore), la moitié du chapitre II de saint Luc et dans la troisième (celle du Jour), le prologue de l’Evangile de saint Jean, qui se lit aussi à la fin de toutes les messes de l’année, du côté gauche de l’autel.
En saint Luc les détails de la naissance du Sauveur nous sont bien connus et l’art chrétien les a popularisé dans le monde entier, surtout par la tradition de la crèche.
Dans la première partie, que nous avons chantée cette nuit, il s’agissait de l’annonce éclatante de la Naissance d’Enfant Divin. Le Ciel finalement s’est ouvert à nouveau, depuis de siècles de
silence. S’adressant aux bergers stupéfaits par l’extraordinaire apparition, l’ange leur dit: «N’ayez pas peur, car je vous apporte une nouvelle de grande joie pour tout le peuple: aujourd’hui, dans la ville de David, est né pour vous le Sauveur, qui est le Christ Seigneur».

L’ange parlait d’une grande joie pour le peuple, tandis que tous dormaient et que peu de personnes, par la suite, connaissaient la grande grâce reçue; mais, évidemment, il regardait vers le
futur, vers la joie des siècles, vers la joie de l’Eglise future (nous tous), peuple de Dieu, réjoui par la Rédemption.
Quelle solennité dans ces paroles: «Aujourd’hui vous est né le Sauveur, qui est le Christ Seigneur!».
Le cœur frémit encore d’amour en s’en souvenant, et pourtant c’est un cœur si mesquin! Sur les lèvres de l’ange, il y avait des paroles lumineuses, dilatées, pour ainsi dire, dans les siècles passés et futurs, qui unissaient les promesses, les figures et les prophéties à la Réalité et projetaient comme un éclair l’unité admirable du dessein de Dieu. Depuis ce moment-là se terminaient les soupirs de l’attente, commençait la joie, et tous les peuples commençaient désormais une nouvelle vie qui devait se développer peu à peu, jusqu’à former, dans l’unité de la foi et de l’amour, le Royaume de Dieu.
C’est un signe merveilleux que l’ange donne aux bergers pour reconnaître le Rédempteur, car, à première vue, il semblerait plus apte à le nier qu’à le confesser dans sa vraie grandeur:
«Vous trouverez un Enfant emmailloté, couché dans une mangeoire».
Trois caractéristiques si opposées à la grandeur de Dieu Un et Trine: la faiblesse, un enfant; la contrainte, enveloppé dans des langes; l’humiliation et la pauvreté, couché dans une crèche. Il
semblait faible, incapable de penser et d’agir, sur un trône d’extrême pauvreté, dans le froid de la crèche en cette nuit glaciale de décembre.

Et étaient-ce là les signes du Dieu Incarné ?
C’est quelque chose de surprenant. Et pourtant, c’étaient des signes indiscutables, car à l’époque on ne pouvait pas trouver un enfant né dans de telles conditions d’annihilation et de pauvreté et on ne pouvait confondre la grâce qu’il répandait avec le charme de l’innocence enfantine.
Il était Dieu, et tout signe de grandeur humaine l’aurait diminué, pas illuminé; l’or, les gemmes, les draperies et une somptueuse demeure auraient tout au plus montré un prince, pas un Dieu.
Il était lumière et ornement pour lui-même et sa véritable et splendide cour étaient Marie et Joseph. Les bergers ne devaient pas le regarder sous une lumière humaine mais sous une grande
lumière de foi, et il était logique qu’il n’eût aucun signe humain proclamant sa grandeur. D’autre part, si le Verbe Incarné, le Sauveur, devait venir, comme il était prédit, Victime
d’amour, quel signe d’amour plus grand que son humiliation, sa pauvreté et son amabilité ? Il devait sceller une nouvelle alliance avec son peuple et naquit dans une grotte d’animaux, déposé dans une crèche, petit mais immense dans la flamme de son amour, qui passait, pour ainsi dire, entre deux animaux non tués mais vivants, comme il passa sous forme de flamme divine entre les animaux morts sacrifiés par Abraham (cf. Gen 15,17).

La tradition constante nous présente dans la grotte un bœuf et un âne qui, avec leur souffle, atténuaient le gel; ils rappelaient l’alliance d’Abraham, renouvelée non dans la mort mais dans la vie. L’un était un animal pour les sacrifices, l’autre non, mais ils étaient unis près de Jésus, flamme d’amour de son Cœur, car Il venait appeler le peuple sacré et le peuple païen. Il était prédit qu’Il devait descendre comme la rosée sur la toison, et voici qu’il était venu de nuit dans une demeure de bêtes. Il était l’Agneau de Dieu, et Il se trouvait dans une grotte aménagée pour la garde des agneaux, où Il se reposait, attendant l’immolation.
Il était prédit qu’Il devait être le Fils d’une Mère vierge, et il suffisait de voir Marie, juste après l’accouchement, agenouillée, adorante, avec les splendeurs de sa pureté virginale, pour comprendre qu’elle était Vierge intacte; il suffisait de voir Joseph dans sa profonde humilité, pour comprendre
qu’il n’avait eu aucune part dans ce merveilleux fruit. Un vrai père, en effet, est le premier à se répandre en tendresses sur son fils et montre, dans sa joie éclatante, sa paternité.

Les bergers, peut-être, n’étaient pas capables de raisonner ainsi, mais le cœur simple est le plus synthétique de tous et devine d’un coup la vérité qui émane des preuves, de ces signes ; pour eux, donc, la condition du nouveau-né était un vrai signe de vérité. Un berger, à cette époque, ne signifiait pas l’ignorance des choses sacrées, parce que même les riches s’occupaient de leurs troupeaux, principale richesse de la famille, et les vérités sur le Messie à venir étaient familières à tous les Juifs, surtout dans cette période de soumission et de domination, qui rendait plus présent le désir de libération.
Mais s’il avait manqué tout autre signe de vérité pour reconnaître dans l’enfant né le Messie, il suffisait de la présence de l’ange et du magnifique concert qu’entonna la troupe d’esprits célestes. Ils chantaient joyeusement: « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté ».

C’était un moment solennel: l’armée angélique, invisible, devenait visible; c’était un chœur de lumière qui brillait à travers la nuit jusqu’au bord de l’horizon. C’étaient des figures aussi brillantes que l’éclair et aussi placides que l’aube ; ils avaient les yeux rivés vers le ciel et tout leur corps était un manteau de gloire. Ils bougeaient comme un ciel étoilé, dans le plus grand ordre, et chantaient. Qui peut imaginer ce qu’était cette chanson? Ce n’étaient pas des notes qui sonnaient en la
matière, elles auraient été trop mesquines; c’étaient des notes de puissance, de sagesse et d’amour qui formaient un accord magnifique, qui devenait appréciation de Dieu, louange à Lui, amour allumé comme un magnifique holocauste, puis répandu comme un flot de grâces sur la pauvre humanité. C’étaient des paroles vivantes qui résonnaient, dans leur sens, avec des harmonies éternelles et revenaient comme une vague d’amour à Notre Dieu Trinité.
Les voix les plus douces disparurent et les anges disparurent dans les hauteurs des cieux. La nuit, qui semblait avoir disparue pour un moment, revenait avec son manteau d’ombres. Le firmament brillait, mais les étoiles ne ressemblaient pas à des étoiles; elles étaient comme des yeux placides et
paisibles regardant la terre, ravies. On aurait dit qu’elles reconnaissaient au loin la voix puissante qui les créait et chantaient un cantique d’ordre à l’éternelle Sagesse incarnée qui les avait harmonisées.

Les bergers adorent Jésus: contemplation de la crèche.
Les bergers restèrent un moment eux aussi extatiques, remplis de joie, rassasiés d’amour et d’un commun accord décidèrent d’aller adorer l’Enfant nouveau-né près de Bethléem. Ils se mirent en mouvement; ils couraient, l’amour les poussait, le désir de voir le Messie les animait; ils allaient droit vers les grottes de refuge, car seule là pouvait se trouver une mangeoire. Ils avancèrent avec hésitation vers la grotte; Marie le savait déjà, car elle les avait appelés avec sa prière. Ils s’arrêtèrent un peu, prosternés au sol; ils exultaient, leur cœur battait presque hors de leur poitrine. L’Enfant divin les fascinait.

Marie leur fit signe; ils entrèrent. Sans Marie, ils ne seraient jamais entrés, car c’est toujours elle qui donne le Christ aux âmes. Ils se sont prosternés, crurent et ils l’ont adoré. Ils n’avaient pas besoin de preuves; toute la preuve résidait dans ces quelques mots du Texte Sacré: «Ils trouvèrent Marie, Joseph et l’Enfant», et, en le voyant, ils furent convaincus de ce qui leur avait été dit à propos de cet Enfant. Il était logique qu’ils soient convaincus, car il était la Vérité, Marie le Siège de la Sagesse, Joseph en était le fidèle gardien.

Ils virent l’Enfant : il était petit, rose, magnifique. Il avait une petite chevelure dorée comme une auréole, le front lumineux d’une sagesse mystérieuse, les yeux brillants de bonté et d’amour, les lèvres souriantes d’amour.
On mourrait d’amour devant Lui, l’âme s’attendrissait, on pleurait. Quelle paix émanait de cette mangeoire! Il était né à Bethléem, la maison du pain, et comme Pain de vie, il reposait dans une mangeoire. Il attirait. On l’aurait vraiment couvert de baisers. Quelle beauté délicate et puissante, douce et majestueuse, petite et plus grande que les cieux! Il parlait doucement à leurs âmes. Quel dialogue d’amour! Ils le ressentaient au fond du cœur et se sentaient régénérés. Ils respiraient la grâce, l’âme se dilatait. Quel amour! Ils ne pouvaient se détacher de cette grotte. Aucun palais n’était
plus beau.
Ils levèrent les yeux vers la Mère : elle était la douce miséricorde; vers saint Joseph: il était la bonté vivante. Leur parlèrent-ils ? La joie les étouffait. Ils pleuraient, et leurs larmes coulaient comme des perles sur le visage de l’Enfant ; elles étaient comme la fusion de l’homme pécheur avec
le Rédempteur. Ils se taisaient. Les heures passaient, mais elles semblaient des instants ; la joie les  effaçait, car elle était presque aux frontières de l’éternité, tant elle était immense. Au Ciel, il n’y a pas d’heures, car même les siècles ne peuvent mesurer les instants.
Il faisait jour; ils durent partir. (Ils revinrent et les brebis bêlaient, non pas de douleur, mais parce qu’une calme sérénité les envahissait. Leur instinct devenait presque raison tellement ils étaient en paix, comme jamais auparavant.)
Les bergers se dispersèrent dans cette terre, apportant la bonne nouvelle; ils étaient déjà apôtres et de bergers de brebis, ils étaient devenus comme des bergers d’âmes: Dieu choisit toujours les humbles pour les grandes annonces de son amour. Ils annonçaient les merveilles qu’ils avaient entendues et vues  et Marie les conservait dans son cœur et les méditait.

Mes chers frères et sœurs, contemplons longtemps et souvent le mystère de la Crèche, de cette nuit sainte et douce. Conservons et méditons tout cela dans notre cœur et répandons partout,
autour de nous, la bonne nouvelle de notre salut. Que Marie, notre Mère, nous obtienne cette grâce, ainsi soit-il.

Source: Méditation de Noël de don Dolindo Ruotolo.

Publié le 26 décembre 2024

Année 2024-Homélie pour la messe de la nuit de Noël (EA).

Les signes d’un Dieu.

Les bergers restèrent un moment eux aussi extatiques, remplis de joie, rassasiés d’amour et d’un commun accord décidèrent d’aller adorer l’Enfant nouveau-né près de Bethléem. Ils se mirent en mouvement; ils couraient, l’amour les poussait, le désir de voir le Messie les animait; ils allaient droit vers les grottes de refuge, car seul là pouvait se trouver une mangeoire.

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La nuit de Noël, aujourd’hui, l’Eglise lit, dans les deux premières messes (celle de minuit et celle de l’Aurore), la moitié du chapitre II de saint Luc et dans la troisième (celle du Jour), le prologue de l’Evangile de saint Jean, qui se lit aussi à la fin de toutes les messes de l’année, du côté gauche de l’autel.
En saint Luc les détails de la naissance du Sauveur nous sont bien connus et l’art chrétien les a popularisé dans le monde entier, surtout par la tradition de la crèche.
Dans la première partie, que nous avons chantée cette nuit, il s’agissait de l’annonce éclatante de la Naissance d’Enfant Divin. Le Ciel finalement s’est ouvert à nouveau, depuis de siècles de
silence. S’adressant aux bergers stupéfaits par l’extraordinaire apparition, l’ange leur dit: «N’ayez pas peur, car je vous apporte une nouvelle de grande joie pour tout le peuple: aujourd’hui, dans la ville de David, est né pour vous le Sauveur, qui est le Christ Seigneur».

L’ange parlait d’une grande joie pour le peuple, tandis que tous dormaient et que peu de personnes, par la suite, connaissaient la grande grâce reçue; mais, évidemment, il regardait vers le
futur, vers la joie des siècles, vers la joie de l’Eglise future (nous tous), peuple de Dieu, réjoui par la Rédemption.
Quelle solennité dans ces paroles: «Aujourd’hui vous est né le Sauveur, qui est le Christ Seigneur!».
Le cœur frémit encore d’amour en s’en souvenant, et pourtant c’est un cœur si mesquin! Sur les lèvres de l’ange, il y avait des paroles lumineuses, dilatées, pour ainsi dire, dans les siècles passés et futurs, qui unissaient les promesses, les figures et les prophéties à la Réalité et projetaient comme un éclair l’unité admirable du dessein de Dieu. Depuis ce moment-là se terminaient les soupirs de l’attente, commençait la joie, et tous les peuples commençaient désormais une nouvelle vie qui devait se développer peu à peu, jusqu’à former, dans l’unité de la foi et de l’amour, le Royaume de Dieu.
C’est un signe merveilleux que l’ange donne aux bergers pour reconnaître le Rédempteur, car, à première vue, il semblerait plus apte à le nier qu’à le confesser dans sa vraie grandeur:
«Vous trouverez un Enfant emmailloté, couché dans une mangeoire».
Trois caractéristiques si opposées à la grandeur de Dieu Un et Trine: la faiblesse, un enfant; la contrainte, enveloppé dans des langes; l’humiliation et la pauvreté, couché dans une crèche. Il
semblait faible, incapable de penser et d’agir, sur un trône d’extrême pauvreté, dans le froid de la crèche en cette nuit glaciale de décembre.

Et étaient-ce là les signes du Dieu Incarné ?
C’est quelque chose de surprenant. Et pourtant, c’étaient des signes indiscutables, car à l’époque on ne pouvait pas trouver un enfant né dans de telles conditions d’annihilation et de pauvreté et on ne pouvait confondre la grâce qu’il répandait avec le charme de l’innocence enfantine.
Il était Dieu, et tout signe de grandeur humaine l’aurait diminué, pas illuminé; l’or, les gemmes, les draperies et une somptueuse demeure auraient tout au plus montré un prince, pas un Dieu.
Il était lumière et ornement pour lui-même et sa véritable et splendide cour étaient Marie et Joseph. Les bergers ne devaient pas le regarder sous une lumière humaine mais sous une grande
lumière de foi, et il était logique qu’il n’eût aucun signe humain proclamant sa grandeur. D’autre part, si le Verbe Incarné, le Sauveur, devait venir, comme il était prédit, Victime
d’amour, quel signe d’amour plus grand que son humiliation, sa pauvreté et son amabilité ? Il devait sceller une nouvelle alliance avec son peuple et naquit dans une grotte d’animaux, déposé dans une crèche, petit mais immense dans la flamme de son amour, qui passait, pour ainsi dire, entre deux animaux non tués mais vivants, comme il passa sous forme de flamme divine entre les animaux morts sacrifiés par Abraham (cf. Gen 15,17).

La tradition constante nous présente dans la grotte un bœuf et un âne qui, avec leur souffle, atténuaient le gel; ils rappelaient l’alliance d’Abraham, renouvelée non dans la mort mais dans la vie. L’un était un animal pour les sacrifices, l’autre non, mais ils étaient unis près de Jésus, flamme d’amour de son Cœur, car Il venait appeler le peuple sacré et le peuple païen. Il était prédit qu’Il devait descendre comme la rosée sur la toison, et voici qu’il était venu de nuit dans une demeure de bêtes. Il était l’Agneau de Dieu, et Il se trouvait dans une grotte aménagée pour la garde des agneaux, où Il se reposait, attendant l’immolation.
Il était prédit qu’Il devait être le Fils d’une Mère vierge, et il suffisait de voir Marie, juste après l’accouchement, agenouillée, adorante, avec les splendeurs de sa pureté virginale, pour comprendre qu’elle était Vierge intacte; il suffisait de voir Joseph dans sa profonde humilité, pour comprendre
qu’il n’avait eu aucune part dans ce merveilleux fruit. Un vrai père, en effet, est le premier à se répandre en tendresses sur son fils et montre, dans sa joie éclatante, sa paternité.

Les bergers, peut-être, n’étaient pas capables de raisonner ainsi, mais le cœur simple est le plus synthétique de tous et devine d’un coup la vérité qui émane des preuves, de ces signes ; pour eux, donc, la condition du nouveau-né était un vrai signe de vérité. Un berger, à cette époque, ne signifiait pas l’ignorance des choses sacrées, parce que même les riches s’occupaient de leurs troupeaux, principale richesse de la famille, et les vérités sur le Messie à venir étaient familières à tous les Juifs, surtout dans cette période de soumission et de domination, qui rendait plus présent le désir de libération.
Mais s’il avait manqué tout autre signe de vérité pour reconnaître dans l’enfant né le Messie, il suffisait de la présence de l’ange et du magnifique concert qu’entonna la troupe d’esprits célestes. Ils chantaient joyeusement: « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté ».

C’était un moment solennel: l’armée angélique, invisible, devenait visible; c’était un chœur de lumière qui brillait à travers la nuit jusqu’au bord de l’horizon. C’étaient des figures aussi brillantes que l’éclair et aussi placides que l’aube ; ils avaient les yeux rivés vers le ciel et tout leur corps était un manteau de gloire. Ils bougeaient comme un ciel étoilé, dans le plus grand ordre, et chantaient. Qui peut imaginer ce qu’était cette chanson? Ce n’étaient pas des notes qui sonnaient en la
matière, elles auraient été trop mesquines; c’étaient des notes de puissance, de sagesse et d’amour qui formaient un accord magnifique, qui devenait appréciation de Dieu, louange à Lui, amour allumé comme un magnifique holocauste, puis répandu comme un flot de grâces sur la pauvre humanité. C’étaient des paroles vivantes qui résonnaient, dans leur sens, avec des harmonies éternelles et revenaient comme une vague d’amour à Notre Dieu Trinité.
Les voix les plus douces disparurent et les anges disparurent dans les hauteurs des cieux. La nuit, qui semblait avoir disparue pour un moment, revenait avec son manteau d’ombres. Le firmament brillait, mais les étoiles ne ressemblaient pas à des étoiles; elles étaient comme des yeux placides et
paisibles regardant la terre, ravies. On aurait dit qu’elles reconnaissaient au loin la voix puissante qui les créait et chantaient un cantique d’ordre à l’éternelle Sagesse incarnée qui les avait harmonisées.

Les bergers adorent Jésus: contemplation de la crèche.
Les bergers restèrent un moment eux aussi extatiques, remplis de joie, rassasiés d’amour et d’un commun accord décidèrent d’aller adorer l’Enfant nouveau-né près de Bethléem. Ils se mirent en mouvement; ils couraient, l’amour les poussait, le désir de voir le Messie les animait; ils allaient droit vers les grottes de refuge, car seule là pouvait se trouver une mangeoire. Ils avancèrent avec hésitation vers la grotte; Marie le savait déjà, car elle les avait appelés avec sa prière. Ils s’arrêtèrent un peu, prosternés au sol; ils exultaient, leur cœur battait presque hors de leur poitrine. L’Enfant divin les fascinait.

Marie leur fit signe; ils entrèrent. Sans Marie, ils ne seraient jamais entrés, car c’est toujours elle qui donne le Christ aux âmes. Ils se sont prosternés, crurent et ils l’ont adoré. Ils n’avaient pas besoin de preuves; toute la preuve résidait dans ces quelques mots du Texte Sacré: «Ils trouvèrent Marie, Joseph et l’Enfant», et, en le voyant, ils furent convaincus de ce qui leur avait été dit à propos de cet Enfant. Il était logique qu’ils soient convaincus, car il était la Vérité, Marie le Siège de la Sagesse, Joseph en était le fidèle gardien.

Ils virent l’Enfant : il était petit, rose, magnifique. Il avait une petite chevelure dorée comme une auréole, le front lumineux d’une sagesse mystérieuse, les yeux brillants de bonté et d’amour, les lèvres souriantes d’amour.
On mourrait d’amour devant Lui, l’âme s’attendrissait, on pleurait. Quelle paix émanait de cette mangeoire! Il était né à Bethléem, la maison du pain, et comme Pain de vie, il reposait dans une mangeoire. Il attirait. On l’aurait vraiment couvert de baisers. Quelle beauté délicate et puissante, douce et majestueuse, petite et plus grande que les cieux! Il parlait doucement à leurs âmes. Quel dialogue d’amour! Ils le ressentaient au fond du cœur et se sentaient régénérés. Ils respiraient la grâce, l’âme se dilatait. Quel amour! Ils ne pouvaient se détacher de cette grotte. Aucun palais n’était
plus beau.
Ils levèrent les yeux vers la Mère : elle était la douce miséricorde; vers saint Joseph: il était la bonté vivante. Leur parlèrent-ils ? La joie les étouffait. Ils pleuraient, et leurs larmes coulaient comme des perles sur le visage de l’Enfant ; elles étaient comme la fusion de l’homme pécheur avec
le Rédempteur. Ils se taisaient. Les heures passaient, mais elles semblaient des instants ; la joie les  effaçait, car elle était presque aux frontières de l’éternité, tant elle était immense. Au Ciel, il n’y a pas d’heures, car même les siècles ne peuvent mesurer les instants.
Il faisait jour; ils durent partir. (Ils revinrent et les brebis bêlaient, non pas de douleur, mais parce qu’une calme sérénité les envahissait. Leur instinct devenait presque raison tellement ils étaient en paix, comme jamais auparavant.)
Les bergers se dispersèrent dans cette terre, apportant la bonne nouvelle; ils étaient déjà apôtres et de bergers de brebis, ils étaient devenus comme des bergers d’âmes: Dieu choisit toujours les humbles pour les grandes annonces de son amour. Ils annonçaient les merveilles qu’ils avaient entendues et vues  et Marie les conservait dans son cœur et les méditait.

Mes chers frères et sœurs, contemplons longtemps et souvent le mystère de la Crèche, de cette nuit sainte et douce. Conservons et méditons tout cela dans notre cœur et répandons partout,
autour de nous, la bonne nouvelle de notre salut. Que Marie, notre Mère, nous obtienne cette grâce, ainsi soit-il.

Source: Méditation de Noël de don Dolindo Ruotolo.

Publié le 26 décembre 2024

Année 2024-Homélie pour la messe de la nuit de Noël (EA).

15994954 - christmas and bible with blurred candles light background

Les signes d’un Dieu.

Les bergers restèrent un moment eux aussi extatiques, remplis de joie, rassasiés d’amour et d’un commun accord décidèrent d’aller adorer l’Enfant nouveau-né près de Bethléem. Ils se mirent en mouvement; ils couraient, l’amour les poussait, le désir de voir le Messie les animait; ils allaient droit vers les grottes de refuge, car seul là pouvait se trouver une mangeoire.

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La nuit de Noël, aujourd’hui, l’Eglise lit, dans les deux premières messes (celle de minuit et celle de l’Aurore), la moitié du chapitre II de saint Luc et dans la troisième (celle du Jour), le prologue de l’Evangile de saint Jean, qui se lit aussi à la fin de toutes les messes de l’année, du côté gauche de l’autel.
En saint Luc les détails de la naissance du Sauveur nous sont bien connus et l’art chrétien les a popularisé dans le monde entier, surtout par la tradition de la crèche.
Dans la première partie, que nous avons chantée cette nuit, il s’agissait de l’annonce éclatante de la Naissance d’Enfant Divin. Le Ciel finalement s’est ouvert à nouveau, depuis de siècles de
silence. S’adressant aux bergers stupéfaits par l’extraordinaire apparition, l’ange leur dit: «N’ayez pas peur, car je vous apporte une nouvelle de grande joie pour tout le peuple: aujourd’hui, dans la ville de David, est né pour vous le Sauveur, qui est le Christ Seigneur».

L’ange parlait d’une grande joie pour le peuple, tandis que tous dormaient et que peu de personnes, par la suite, connaissaient la grande grâce reçue; mais, évidemment, il regardait vers le
futur, vers la joie des siècles, vers la joie de l’Eglise future (nous tous), peuple de Dieu, réjoui par la Rédemption.
Quelle solennité dans ces paroles: «Aujourd’hui vous est né le Sauveur, qui est le Christ Seigneur!».
Le cœur frémit encore d’amour en s’en souvenant, et pourtant c’est un cœur si mesquin! Sur les lèvres de l’ange, il y avait des paroles lumineuses, dilatées, pour ainsi dire, dans les siècles passés et futurs, qui unissaient les promesses, les figures et les prophéties à la Réalité et projetaient comme un éclair l’unité admirable du dessein de Dieu. Depuis ce moment-là se terminaient les soupirs de l’attente, commençait la joie, et tous les peuples commençaient désormais une nouvelle vie qui devait se développer peu à peu, jusqu’à former, dans l’unité de la foi et de l’amour, le Royaume de Dieu.
C’est un signe merveilleux que l’ange donne aux bergers pour reconnaître le Rédempteur, car, à première vue, il semblerait plus apte à le nier qu’à le confesser dans sa vraie grandeur:
«Vous trouverez un Enfant emmailloté, couché dans une mangeoire».
Trois caractéristiques si opposées à la grandeur de Dieu Un et Trine: la faiblesse, un enfant; la contrainte, enveloppé dans des langes; l’humiliation et la pauvreté, couché dans une crèche. Il
semblait faible, incapable de penser et d’agir, sur un trône d’extrême pauvreté, dans le froid de la crèche en cette nuit glaciale de décembre.

Et étaient-ce là les signes du Dieu Incarné ?
C’est quelque chose de surprenant. Et pourtant, c’étaient des signes indiscutables, car à l’époque on ne pouvait pas trouver un enfant né dans de telles conditions d’annihilation et de pauvreté et on ne pouvait confondre la grâce qu’il répandait avec le charme de l’innocence enfantine.
Il était Dieu, et tout signe de grandeur humaine l’aurait diminué, pas illuminé; l’or, les gemmes, les draperies et une somptueuse demeure auraient tout au plus montré un prince, pas un Dieu.
Il était lumière et ornement pour lui-même et sa véritable et splendide cour étaient Marie et Joseph. Les bergers ne devaient pas le regarder sous une lumière humaine mais sous une grande
lumière de foi, et il était logique qu’il n’eût aucun signe humain proclamant sa grandeur. D’autre part, si le Verbe Incarné, le Sauveur, devait venir, comme il était prédit, Victime
d’amour, quel signe d’amour plus grand que son humiliation, sa pauvreté et son amabilité ? Il devait sceller une nouvelle alliance avec son peuple et naquit dans une grotte d’animaux, déposé dans une crèche, petit mais immense dans la flamme de son amour, qui passait, pour ainsi dire, entre deux animaux non tués mais vivants, comme il passa sous forme de flamme divine entre les animaux morts sacrifiés par Abraham (cf. Gen 15,17).

La tradition constante nous présente dans la grotte un bœuf et un âne qui, avec leur souffle, atténuaient le gel; ils rappelaient l’alliance d’Abraham, renouvelée non dans la mort mais dans la vie. L’un était un animal pour les sacrifices, l’autre non, mais ils étaient unis près de Jésus, flamme d’amour de son Cœur, car Il venait appeler le peuple sacré et le peuple païen. Il était prédit qu’Il devait descendre comme la rosée sur la toison, et voici qu’il était venu de nuit dans une demeure de bêtes. Il était l’Agneau de Dieu, et Il se trouvait dans une grotte aménagée pour la garde des agneaux, où Il se reposait, attendant l’immolation.
Il était prédit qu’Il devait être le Fils d’une Mère vierge, et il suffisait de voir Marie, juste après l’accouchement, agenouillée, adorante, avec les splendeurs de sa pureté virginale, pour comprendre qu’elle était Vierge intacte; il suffisait de voir Joseph dans sa profonde humilité, pour comprendre
qu’il n’avait eu aucune part dans ce merveilleux fruit. Un vrai père, en effet, est le premier à se répandre en tendresses sur son fils et montre, dans sa joie éclatante, sa paternité.

Les bergers, peut-être, n’étaient pas capables de raisonner ainsi, mais le cœur simple est le plus synthétique de tous et devine d’un coup la vérité qui émane des preuves, de ces signes ; pour eux, donc, la condition du nouveau-né était un vrai signe de vérité. Un berger, à cette époque, ne signifiait pas l’ignorance des choses sacrées, parce que même les riches s’occupaient de leurs troupeaux, principale richesse de la famille, et les vérités sur le Messie à venir étaient familières à tous les Juifs, surtout dans cette période de soumission et de domination, qui rendait plus présent le désir de libération.
Mais s’il avait manqué tout autre signe de vérité pour reconnaître dans l’enfant né le Messie, il suffisait de la présence de l’ange et du magnifique concert qu’entonna la troupe d’esprits célestes. Ils chantaient joyeusement: « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté ».

C’était un moment solennel: l’armée angélique, invisible, devenait visible; c’était un chœur de lumière qui brillait à travers la nuit jusqu’au bord de l’horizon. C’étaient des figures aussi brillantes que l’éclair et aussi placides que l’aube ; ils avaient les yeux rivés vers le ciel et tout leur corps était un manteau de gloire. Ils bougeaient comme un ciel étoilé, dans le plus grand ordre, et chantaient. Qui peut imaginer ce qu’était cette chanson? Ce n’étaient pas des notes qui sonnaient en la
matière, elles auraient été trop mesquines; c’étaient des notes de puissance, de sagesse et d’amour qui formaient un accord magnifique, qui devenait appréciation de Dieu, louange à Lui, amour allumé comme un magnifique holocauste, puis répandu comme un flot de grâces sur la pauvre humanité. C’étaient des paroles vivantes qui résonnaient, dans leur sens, avec des harmonies éternelles et revenaient comme une vague d’amour à Notre Dieu Trinité.
Les voix les plus douces disparurent et les anges disparurent dans les hauteurs des cieux. La nuit, qui semblait avoir disparue pour un moment, revenait avec son manteau d’ombres. Le firmament brillait, mais les étoiles ne ressemblaient pas à des étoiles; elles étaient comme des yeux placides et
paisibles regardant la terre, ravies. On aurait dit qu’elles reconnaissaient au loin la voix puissante qui les créait et chantaient un cantique d’ordre à l’éternelle Sagesse incarnée qui les avait harmonisées.

Les bergers adorent Jésus: contemplation de la crèche.
Les bergers restèrent un moment eux aussi extatiques, remplis de joie, rassasiés d’amour et d’un commun accord décidèrent d’aller adorer l’Enfant nouveau-né près de Bethléem. Ils se mirent en mouvement; ils couraient, l’amour les poussait, le désir de voir le Messie les animait; ils allaient droit vers les grottes de refuge, car seule là pouvait se trouver une mangeoire. Ils avancèrent avec hésitation vers la grotte; Marie le savait déjà, car elle les avait appelés avec sa prière. Ils s’arrêtèrent un peu, prosternés au sol; ils exultaient, leur cœur battait presque hors de leur poitrine. L’Enfant divin les fascinait.

Marie leur fit signe; ils entrèrent. Sans Marie, ils ne seraient jamais entrés, car c’est toujours elle qui donne le Christ aux âmes. Ils se sont prosternés, crurent et ils l’ont adoré. Ils n’avaient pas besoin de preuves; toute la preuve résidait dans ces quelques mots du Texte Sacré: «Ils trouvèrent Marie, Joseph et l’Enfant», et, en le voyant, ils furent convaincus de ce qui leur avait été dit à propos de cet Enfant. Il était logique qu’ils soient convaincus, car il était la Vérité, Marie le Siège de la Sagesse, Joseph en était le fidèle gardien.

Ils virent l’Enfant : il était petit, rose, magnifique. Il avait une petite chevelure dorée comme une auréole, le front lumineux d’une sagesse mystérieuse, les yeux brillants de bonté et d’amour, les lèvres souriantes d’amour.
On mourrait d’amour devant Lui, l’âme s’attendrissait, on pleurait. Quelle paix émanait de cette mangeoire! Il était né à Bethléem, la maison du pain, et comme Pain de vie, il reposait dans une mangeoire. Il attirait. On l’aurait vraiment couvert de baisers. Quelle beauté délicate et puissante, douce et majestueuse, petite et plus grande que les cieux! Il parlait doucement à leurs âmes. Quel dialogue d’amour! Ils le ressentaient au fond du cœur et se sentaient régénérés. Ils respiraient la grâce, l’âme se dilatait. Quel amour! Ils ne pouvaient se détacher de cette grotte. Aucun palais n’était
plus beau.
Ils levèrent les yeux vers la Mère : elle était la douce miséricorde; vers saint Joseph: il était la bonté vivante. Leur parlèrent-ils ? La joie les étouffait. Ils pleuraient, et leurs larmes coulaient comme des perles sur le visage de l’Enfant ; elles étaient comme la fusion de l’homme pécheur avec
le Rédempteur. Ils se taisaient. Les heures passaient, mais elles semblaient des instants ; la joie les  effaçait, car elle était presque aux frontières de l’éternité, tant elle était immense. Au Ciel, il n’y a pas d’heures, car même les siècles ne peuvent mesurer les instants.
Il faisait jour; ils durent partir. (Ils revinrent et les brebis bêlaient, non pas de douleur, mais parce qu’une calme sérénité les envahissait. Leur instinct devenait presque raison tellement ils étaient en paix, comme jamais auparavant.)
Les bergers se dispersèrent dans cette terre, apportant la bonne nouvelle; ils étaient déjà apôtres et de bergers de brebis, ils étaient devenus comme des bergers d’âmes: Dieu choisit toujours les humbles pour les grandes annonces de son amour. Ils annonçaient les merveilles qu’ils avaient entendues et vues  et Marie les conservait dans son cœur et les méditait.

Mes chers frères et sœurs, contemplons longtemps et souvent le mystère de la Crèche, de cette nuit sainte et douce. Conservons et méditons tout cela dans notre cœur et répandons partout,
autour de nous, la bonne nouvelle de notre salut. Que Marie, notre Mère, nous obtienne cette grâce, ainsi soit-il.

Source: Méditation de Noël de don Dolindo Ruotolo.

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Publié le 26 décembre 2024