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Année 2023-Homélie pour le 29ème dimanche du temps ordinaire (JA).

La vertu de modestie .

Pour accroitre et garder la vertu de modestie, le moyen c’est l’obéissance au conseil de notre Seigneur Jésus-Christ: « Veillez et priez, afin de ne pas entrer en tentation ». Fuir les occasions de péché; grande vigilance sur chacun de nos sens, afin qu’ils ne s’arrêtent jamais sur quelque objet laid, indécent, déplacé, ou même inutile.


Suivant notre projet de prédication sur les vertus, aujourd’hui nous allons nous entretenir de la vertu de la modestie (1).

Voici d’abord quelques définitions de la modestie que nous offre le dictionnaire de la langue française : « Pudeur dans l’expression des sentiments », et encore : « Modération, réserve, retenue dans l’appréciation de soi-même ». Des synonymes: « Discrétion, humilité, simplicité, décence, honnêteté, pudeur, vertu ». Et ses contraires: « Fatuité, infatuation, orgueil, présomption, prétention, suffisance, vanité ».
Le mot modestie est emprunté du latin « modestia »: « modération, mesure ». Et même si toute vertu implique déjà une certaine mesure, un juste milieu entre deux extrêmes mauvais, on peut affirmer que la modestie est une vertu particulière et non pas quelque chose de général qu’on trouve un peu dans chaque vertu. Ainsi la « mesure », qui se remarque communément en toute vertu, est attribuée d’une manière spéciale à la vertu qui apporte la mesure dans les petites choses, dans les petites inclinations, dans les passions moins fortes.
La vertu de la modestie une partie de la tempérance. La tempérance use de modération en ce qu’il y a de plus difficile à modérer: les convoitises des délectations du toucher : la nourriture et le sexe. Et pour les choses moins difficiles à modérer il y a cette autre vertu qui s’appelle la modestie; elle est donc annexée à la tempérance comme vertu principale. (De la même manière que la magnificence se rapporte aux grandes dépenses d’argent et qu’à côté d’elle est nécessaire la vertu de libéralité, qui se rapporte aux dépenses de moindre importance).

Saint Thomas, dans la Somme de Théologie, affirme que les choses, les inclinations, ou encore les mouvements modérés par la vertu de modestie sont au nombre de quatre:
La première inclination à modérer est le mouvement de l’âme vers une certaine supériorité et, en cela, la modestie devient la compagne de l’humilité qui s’oppose à l’orgueil.
La deuxième inclination est le désir de ce qui se rapporte à la connaissance et, en cette tâche, la modestie se fait l’auxiliaire de la studiosité, qui s’oppose à la curiosité (nous en parlerons dans une prochaine homélie).
La troisième inclination est celle qui se rapporte aux mouvements et aux actions du corps, afin qu’ils se fassent de façon décente et honnête, tant dans les choses faites sérieusement que dans celles faites par jeu ou diversion. Il s’agit ici de la modestie dans les paroles et dans les gestes.
La quatrième inclination à modérer par la modestie est celle qui se rapporte aux apprêts extérieurs, dans les vêtements, les coiffures et les autres choses de ce genre: c’est la modestie dans la toilette extérieure.

Arrêtons-nous maintenant brièvement sur la considération de cette quatrième inclination modérée par la vertu de la modestie. L’Esprit Saint dit par la plume de saint Paul: « Que votre modestie soit connue de tous les hommes: le Seigneur est proche » (Phil 4, 5). Et aussi: « Je veux aussi que les femmes, vêtues d’une manière décente, avec pudeur et modestie, ne se parent ni de tresses, ni d’or, ni de perles, ni d’habits somptueux, mais qu’elles se parent de bonnes œuvres, comme il convient à des femmes qui font profession de servir Dieu » (1 Tim 2 9-10).
Parlant de la toilette extérieure il faut dire un mot sur la « mode »(2). La mode naît spontanément de la sociabilité humaine, qui incline à se mettre en harmonie avec les habitudes des personnes parmi lesquelles on vit. Dieu ne demande pas de vivre en dehors de son temps, de rester indifférent aux exigences de la mode au point de se rendre ridicule en s’habillant à l’encontre des goûts et des usages communs de ses contemporains, sans se préoccuper jamais de ce qui leur plaît. Ainsi, saint Thomas d’Aquin dit qu’il y a acte de vertu dans la parure féminine quand elle est conforme à l’usage, conforme à l’état de la personne et dans une bonne intention: lorsque les femmes portent des ornements décents en harmonie avec leur état et leur dignité, lorsqu’elles suivent en cela avec mesure les coutumes de leur pays.
Mais il y a bien des modes qui sont à fuir, puisqu’elles sont mauvaises, car au lieu de parer ou de mettre en valeur la personne, elles dévoilent ce qui devrait rester cacher.
Dans l’attitude à observer à l’égard de la mode, la vertu tient le juste milieu. La mode n’est pas, et ne peut pas être la règle suprême d’une conduite: au-dessus des exigences de la mode, il y a des lois plus hautes qui ne peuvent être sacrifiées par plaisir ou par caprice. Ces principes ont été proclamés par Dieu, par l’Eglise, par les saints et les saintes, par la raison et par la morale chrétienne.
Ainsi ce sont la vérité, la pureté, la modestie, la dignité et l’honneur qui doivent guider une mode pour qu’elle soit bonne.
Le vêtement exprime les dispositions de l’âme, et en même temps il les suscite, il les favorise, il les renforce. Dans ce sens nous pouvons remarquer l’importance positive, par exemple, de bien se vêtir le dimanche pour venir à la sainte messe. Cela aide à l’élévation de l’esprit.
Saint Thomas d’Aquin rappelle en ce qui concerne la manière de se vêtir (des femmes, mais cela vaut aussi pour les hommes) que le bien de notre âme l’emporte sur celui de notre corps : voilà la limite au-delà de laquelle la mode est source de ruine pour l’âme.
Il nous faut donc retrouver la beauté d’une vraie pudeur, vertu encore annexe de la modestie. Dieu aime les âmes pures : « Bienheureux les cœurs purs, parce qu’ils verront Dieu » (Mat 5, 8). La pudeur est le respect de soi-même et des autres. Elle implique l’exercice de la retenue et de la modestie chrétienne, en « préservant l’intimité de la personne. Elle désigne le refus de dévoiler ce qui doit rester caché […]. Elle est modestie (du latin « modus », mesure, limite). Elle inspire le choix du vêtement. Elle maintient le silence ou la réserve, là où transparaît le risque d’une curiosité malsaine » (CEC n° 2521-2522).

Pour accroitre et garder la vertu de modestie, le moyen c’est l’obéissance au conseil de notre Seigneur Jésus-Christ: « Veillez et priez, afin de ne pas entrer en tentation » (Mat 26, 41). Fuir les occasions de péché; grande vigilance sur chacun de nos sens, afin qu’ils ne s’arrêtent jamais sur quelque objet laid, indécent, déplacé, ou même inutile; le jeûne et la prière : la dévotion à la Sainte Vierge, modèle de pureté et de modestie, est très importante, ainsi que la fréquentation des sacrements de pénitence et d’eucharistie.

Que par l’intercession de la plus modeste de ses créatures, la Mère de Dieu, notre Seigneur nous accorde comme grâce de pratiquer la vertu de la modestie.

(1) Somme de Théologie, saint Thomas. Q 160 –  169.

(2) Les Trois Blancheurs, La Charité, p. 116.

(3)Les Trois Blancheurs, La Charité : « La pudeur est innée, mais fragile: elle peut disparaître par des comportements déplacés réguliers. Elle nécessite donc une vigilance de chaque instant, particulièrement: dans les regards, afin qu’ils ne s’arrêtent jamais sur quelque objet laid, indécent, déplacé, ou même inutile; dans les habillements: il y a des parures ou des modes indécentes. La pudeur chrétienne évite non seulement ce qui est mal en soi, mais aussi ce qui peut être pour autrui l’occasion du mal. Si Adam et Eve étaient nus avant la chute, ils s’habillent après, du fait de la concupiscence, qui fait désirer de manière déréglée les plaisirs de la chair; dans les comportements: ils doivent être sobres et emprunts de mortification, spécialement en évitant tout excès dans le boire et le manger. Il y a un juste milieu entre la pudibonderie (une pudeur excessive et ridicule qui fait de faux scandales) et la grossière dépravation; dans les paroles, toujours mesurées et évitant l’inutile ou le déplacé.
La pudeur nécessite une certaine mortification et un certain courage: la fuite des occasions dangereuses: Jésus nous dit dans l’Evangile: « Veillez et priez, afin de ne pas entrer en tentation » (Mat 26, 41), car celui qui aime le danger y périra; la vigilance sur les sens: sur les yeux (regards indiscrets, télévision, internet), sur les oreilles (écoute de discours trop « libres »), sur la langue (plaisanteries à double sens, chansons légères), sur le goût (excès dans le boire et le manger), sur le toucher (familiarités, danses), sur l’imagination (pensées, lectures), sur le cœur (amours déplacés); le jeûne et la prière: certains démons ne se chassent que par le jeune et la prière. La pureté est un don de Dieu, qui ne le refuse jamais à ceux qui le lui demandent. La dévotion à la Sainte Vierge, modèle de pureté et de modestie, est très importante, ainsi que la fréquentation des sacrements de pénitence et d’eucharistie ».

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