Veritatis Splendor : 30 ans après.
Le fait que certains croyants agissent sans suivre les enseignements du Magistère ou qu’ils considèrent à tort comme moralement juste une conduite que leurs pasteurs ont déclarée contraire à la Loi de Dieu, ne peut pas être un argument valable pour réfuter la vérité des normes morales enseignées par l’Eglise.
Le 6 août, il y a 30 ans, Jean-Paul II publiait l’encyclique Veritatis splendor «sur quelques questions fondamentales de l’enseignement moral de l’Eglise». Veritatis splendor ne contient pas toute la doctrine morale catholique; son but était de dénoncer et de corriger certaines présentations erronées de la morale catholique sur des questions fondamentales. C’est peut-être, de toutes les encycliques de Jean-Paul II, la plus négligée et la moins appliquée, mais le Pape Benoît XVI affirmait que «aujourd’hui elle conserve toute son actualité, étudier cette encyclique et l’assimiler reste un grand et important devoir». Alors je voudrais partager avec vous de manière simple quelques réflexions autour de cette encyclique.
Une véritable crise.
Jean-Paul II écrit que circulent, «même dans les séminaires et les facultés de théologie», des théories contraires à l’enseignement moral de l’Eglise, qui mettent en danger la foi et le salut des fidèles. Le Pape parle de l’existence d’une «véritable crise, tant les difficultés entraînées sont graves pour la vie morale des fidèles», et la vie en société. Le Souverain Pontife mentionne d’ailleurs cette parole de saint Paul: «Car un temps viendra où les hommes ne supporteront plus la saine doctrine, mais au contraire, au gré de leurs passions et l’oreille les démangeant, ils se donneront des maîtres en quantité et détourneront l’oreille de la vérité pour se tourner vers les fables.» (2 Timothée 4, 3-4).
Avec cette encyclique, Jean-Paul II veut mettre fin à la confusion qui règne dans l’esprit de trop de fidèles, qui se sont fait répéter pendant des années par de faux prophètes, qui se prétendent catholiques mais qui ne le sont que de nom seulement ne restant dans l’Eglise que pour mieux la détruire, des mensonges comme «il n’y a plus de péchés, il n’y a pas d’enfer, les Dix Commandements sont dépassés et ne sont plus valides aujourd’hui, on peut être bon catholique et être sauvé tout en étant contre l’enseignement de l’Eglise, on n’a qu’à prendre ce qui fait notre affaire et laisser tomber le reste, etc.». A force d’entendre de telles faussetés, plusieurs catholiques ont malheureusement fini par les croire, à la grande satisfaction du démon, qui veut la perte des âmes et l’échec du plan de Dieu.
Obéir aux Commandements de Dieu.
Comme base de l’encyclique, Jean-Paul II reprend le dialogue de Jésus avec le jeune homme riche: – «Maître, que dois-je faire de bon pour obtenir la vie éternelle?» – «Si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements». L’observance des Dix Commandements est donc la première condition du salut. Ce n’est pas l’homme qui peut décider de ce qui est bien ou mal, mais Dieu seul.
Dans ce sens, l’expression «il faut agir selon sa conscience» n’est valide que si notre conscience est soumise à la vérité, à la Loi divine, dont l’Eglise catholique romaine est la fidèle dépositaire et interprète, selon le mandat que lui a confié le Christ. En effet, quelqu’un peut être sincère, mais être tout de même dans l’erreur. L’Eglise est donc là pour aider les fidèles à former leur conscience. C’est pourquoi l’Eglise enseigne que s’il est vrai que tout homme a une volonté libre, il existe aussi «l’obligation morale grave pour tous de chercher la vérité et, une fois qu’elle est connue, d’y adhérer. C’est en ce sens que le Cardinal J. H. Newman, éminent défenseur des droits de la conscience, affirmait avec force : « La conscience a des droits parce qu’elle a des devoirs »».
Certains, pour justifier leurs péchés, pourraient en effet se forger de faux raisonnements, mais la Parole de Dieu est très claire: «L’apôtre Paul déclare que n’hériteront du Royaume de Dieu “ni impudiques, ni idolâtres, ni adultères, ni dépravés, ni gens de mœurs infâmes, ni voleurs, ni cupides, pas plus qu’ivrognes, insulteurs ou rapaces” (1 Corinthiens 6, 9-10)». «Les préceptes négatifs de la loi naturelle (“Tu ne tueras pas”, etc.) sont universellement valables: ils obligent tous et chacun, toujours et en toute circonstance. En effet, ils interdisent une action déterminée semper et pro semper, sans exception, parce que le choix d’un tel comportement n’est en aucun cas compatible avec la bonté de la volonté de la personne qui agit, avec sa vocation à la vie avec Dieu et à la communion avec le prochain. Il est défendu à tous et toujours de transgresser des préceptes qui interdisent, à tous et à tout prix, d’offenser en quiconque et, avant tout, en soi-même la dignité personnelle commune à tous».
Le Pape rappelle l’existence du péché mortel qui, comme son nom l’indique, donne la mort à l’âme, et dont la présence d’un seul nous mérite l’enfer: «Avec chaque péché commis de manière délibérée, l’homme offense Dieu qui a donné la Loi et il se rend donc coupable à l’égard de la Loi tout entière; tout en restant dans la foi, il perd la grâce sanctifiante, la charité et la béatitude éternelle. Le Synode des évêques de 1983 n’a pas “seulement réaffirmé ce qui avait été proclamé par le Concile de Trente sur l’existence et la nature de péchés mortels et véniels, mais il a voulu rappeler qu’est péché mortel tout péché qui a pour objet une matière grave et qui, de plus, est commis en pleine conscience et de consentement délibéré”».
L’amour de Dieu jusqu’au martyre.
«L’amour de Dieu et l’amour du prochain sont inséparables de l’observance des commandements de l’Alliance, renouvelée dans le sang de Jésus Christ et dans le don de l’Esprit. C’est justement l’honneur des chrétiens d’obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes et, pour cela, d’accepter même le martyre, comme l’ont fait des saints et des saintes de l’Ancien et du Nouveau Testament, reconnus tels pour avoir donné leur vie plutôt que d’accomplir tel ou tel geste particulier contraire à la foi ou à la vertu. L’Eglise propose l’exemple de nombreux saints et saintes qui ont rendu témoignage à la vérité morale et l’ont défendue jusqu’au martyre, préférant la mort à un seul péché mortel. En les élevant aux honneurs des autels, l’Eglise a canonisé leur témoignage et déclaré vrai leur jugement, selon lequel l’amour de Dieu implique obligatoirement le respect de ses commandements, même dans les circonstances les plus graves, et le refus de les transgresser, même dans l’intention de sauver sa propre vie. Par rapport aux normes morales qui interdisent le mal intrinsèque, il n’y a de privilège ni d’exception pour personne. Que l’on soit le maître du monde ou le dernier des “misérables” sur la face de la terre, cela ne fait aucune différence: devant les exigences morales, nous sommes tous absolument égaux. Les autorités civiles et les particuliers ne sont jamais autorisés à transgresser les droits fondamentaux et inaliénables de la personne humaine».
Même si nous savons ce qui est bien, nous ne le faisons pas toujours car, depuis la chute de nos premiers parents Adam et Eve, le péché originel est en nous, et nous sommes tentés de faire le mal. C’est pourquoi Dieu nous offre l’aide de sa grâce pour vaincre les tentations, et si nous tombons dans le péché, Dieu nous donne la grâce de nous relever par le sacrement de pénitence.
Pas une démocratie.
Quand bien même une majorité de catholiques seraient en faveur de l’avortement ou du contrôle artificiel des naissances (la «pilule», etc.) cela ne change absolument rien au fait que l’avortement et le contrôle artificiel des naissances sont un mal en tout temps. En effet, comme il a été dit précédemment, ce n’est pas l’homme qui décide de ce qui est bien ou mal, mais Dieu seul. Pareillement, même si une majorité de fidèles faisaient pression sur le Pape pour qu’il déclare que l’avortement et la pilule ne sont plus péchés, cela serait complètement inutile, car ce n’est pas le Pape qui est l’auteur des Dix Commandements, mais Dieu; ni le Pape ni aucun homme n’a le pouvoir de les changer. Le devoir du Pape et de l’Eglise, c’est de dire la vérité aux fidèles, même sur les points les plus difficiles, que cela plaise ou non à certains.
Le Pape l’explique ainsi dans son encyclique: «Le fait que certains croyants agissent sans suivre les enseignements du Magistère ou qu’ils considèrent à tort comme moralement juste une conduite que leurs pasteurs ont déclarée contraire à la Loi de Dieu, ne peut pas être un argument valable pour réfuter la vérité des normes morales enseignées par l’Eglise. Le dissentiment, fait de contestations délibérées et de polémiques, exprimé en utilisant les moyens de communication sociale, est contraire à la communion ecclésiale et à la droite compréhension de la constitution hiérarchique du Peuple de Dieu».
Le devoir des évêques.
Le Pape termine son encyclique en rappelant le devoir des évêques:
«En tant qu’évêques, nous avons le devoir d’être vigilants pour que la Parole de Dieu soit fidèlement enseignée. Mes Frères dans l’Episcopat, il entre dans notre ministère pastoral de veiller à la transmission fidèle de cet enseignement moral et de prendre les mesures qui conviennent pour que les fidèles soient préservés de toute doctrine ou de toute théorie qui lui sont contraires. Dans cette tâche, nous avons l’aide des théologiens. Cependant, les opinions théologiques ne constituent ni la règle ni la norme de notre enseignement, dont l’autorité découle, avec l’aide de l’Esprit Saint et dans la communion avec Pierre et sous Pierre, de notre fidélité à la foi catholique reçue des apôtres. Comme évêques, nous avons le grave devoir de veiller personnellement à ce que la “saine doctrine” de la foi et de la morale soit enseignée dans nos diocèses».