Notre-Seigneur dit : « Il est aussi enfant d’Abraham, » pour nous apprendre que ce ne sont pas seulement ceux qui ont vécu dans la sainteté dès leur enfance, mais aussi ceux qui renoncent à leur vie injuste et de péché qui deviennent héritiers du salut éternel.
« Jésus traversait la ville de Jéricho. Or, il y avait là un homme du nom de Zachée ; il était le chef des collecteurs d’impôts [un publicain], et c’était quelqu’un de riche ».
L’Evangile commence par nous apprendre que Zachée était un homme riche, le chef des publicains. L’évangéliste ne donne pas d’indication supplémentaire mais nous savons que les publicains étaient méprisés, qu’on les considérait comme des pécheurs et cela pour deux raisons. Tout d’abord ils étaient souvent malhonnêtes et, en collectant les impôts, ils prélevaient plus que ce qui était dû pour conserver la différence et faire un profit. En second lieu, ils étaient au service d’une puissance païenne, étrangère, puisqu’ils percevaient les taxes au profit de l’empire romain.
Zachée était donc quelqu’un de riche et pourtant on peut affirmer qu’il était pauvre et très pauvre, car il lui manquait la vraie richesse, l’unique richesse, il lui manquait Jésus. Sa richesse à lui, jusque-là lui servait uniquement à se perdre, à se condamner.
C’est ce que Jésus affirme à la fin de cet épisode : « le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu », dont Zachée.
« Il cherchait à voir qui était Jésus, mais il ne le pouvait pas à cause de la foule, car il était de petite taille ».
Deux choses s’opposaient à ce que Zachée puisse voir Jésus. D’abord il en était empêché par la foule. La foule de ses péchés et de ses crimes plutôt que la foule de personnes. L’attachement aux péchés empêche effectivement d’approcher de Jésus. En second lieu, il était petit de taille. Il était petit par suite de sa malice [au contraire on dit que quelqu’un est grand à cause de son amour, de sa générosité, de ses vertus], ou peut-être encore parce qu’il n’avait pas la foi.
Quoiqu’il en soit il fait de son mieux afin de vaincre ces obstacles. Avant même que Jésus lui parle, il obéi déjà dans son cœur à l’appel de Dieu. Il répond, comme il le peut, à son désir de voir Jésus car c’est un appel de Dieu.
Il se sépare de la foule et il monte dans un arbre. Dieu veut nous montrer par-là que la conversion est une affaire personnelle. Peut-être au début la foule de gens a attiré l’attention de Zachée, mais ensuite c’est lui-même qui a pris l’initiative d’aller plus loin.
« Jésus leva les yeux et lui dit : « Zachée, descends vite : aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison ». Vite, il descendit et reçut Jésus avec joie »». Et une fois rentré : « Aujourd’hui, dit Jésus, le salut est arrivé pour cette maison, car lui aussi est un fils d’Abraham. En effet, le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu ».
Quelle beauté, quelle douceur, quelle consolation pour l’âme fidèle dans ces paroles de Jésus : « Zachée, aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison » afin de te donner le salut.
Il nous le répète à chaque Messe, juste avant la communion.
En effet, les paroles que nous récitons : « Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri » s’inspirent de l’épisode où Jésus veut aller chez le centurion afin de guérir son serviteur, mais le centurion posant un fort acte de foi (qui sera loué par Jésus) lui dit : « Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri ».
Le seul désir de notre bon Jésus se faisant homme et ensuite se faisant Eucharistie est de demeurer chez nous, dans notre cœur : « il faut que j’aille demeurer dans ta maison ». Sans quoi nous n’aurons pas le salut.
Les soi-disant « gens de bien » contemporains de Jésus n’avaient aucune relation avec les publicains et les pécheurs et refusaient de les recevoir ou d’être invité chez eux. Jésus agit différemment et ne partage pas ce mépris pour les publicains. Il tient compte justement de la situation actuelle du pécheur afin de lui faire miséricorde. En effet « Il est venu chercher et sauver ce qui était perdu ». Il voit déjà les changements et les conversions qui se suivront, car étant le Créateur il connait les cœurs.
Et la conversion a lieu de ce que Jésus, « soleil de justice », vient éclairer notre maison, vient chasser les ténèbres de nos péchés.
Zachée était un homme riche. Mais « voici, dit saint Bède, que le chameau a déposé la lourde charge qu’il portait sur son dos, et il passe par le trou d’une aiguille, c’est-à-dire, un riche, un publicain, sacrifie l’amour des richesses, renonce à tous ses profits malhonnêtes, et reçoit la bénédiction que lui apporte la visite du Sauveur ».
Et saint Ambroise commente : « Que les riches apprennent donc que le crime n’est pas dans les richesses, mais dans le mauvais usage qu’on en fait ; car si les richesses sont un moyen de perdition pour les méchants, elles sont dans la main des bons un puissant auxiliaire de leur vertu ».
Finalement Zachée mérite aussi d’être appelé fils d’Abraham car d’une certaine manière il a mérité le salut, il a été docile à la voix de Dieu.
Enfant d’Abraham, explique encore saint Bède, non parce qu’il est né de sa race, mais parce qu’il a été l’imitateur de sa foi, et qu’il a renoncé à ses biens pour les distribuer aux pauvres, de même qu’Abraham avait quitté son pays et la maison de son père. Notre-Seigneur dit : « Il est aussi enfant d’Abraham, » pour nous apprendre que ce ne sont pas seulement ceux qui ont vécu dans la sainteté dès leur enfance, mais aussi ceux qui renoncent à leur vie injuste et de péché qui deviennent héritiers du salut éternel.
Que la Vierge Marie, nous vienne en aide afin que Jésus trouve un bon accueil dans la demeure de notre cœur.