L’Ascension du Christ est notre élévation.
En entrant au Ciel, Jésus nous en a ouvert les portes. Il est allé nous préparer une place, là où un jour, selon sa promesse, nous serons toujours avec lui. Nous devons, selon le mot de saint Paul, rechercher les choses d’en haut, où le Christ demeure assis à la droite de Dieu.
Après le chant de l’Evangile, on éteint le cierge pascal, le symbole de la Résurrection. Par cette simple cérémonie, la liturgie veut exprimer que le Christ est monté aujourd’hui au ciel.
Quand des personnes chères se séparent de nous, nous nous affligeons, même si nous savons qu’elles rencontreront un sort meilleur. Aussi nous pourrions penser que l’Eglise assistera à l’Ascension avec mélancolie. Il n’en est rien. La fête est exclusivement une fête de joie. Une double joie remplit nos cœurs; nous nous réjouissons pour le Seigneur et pour nous-mêmes.
La journée de l’Ascension est un triomphe du Christ, une fête de victoire.
Le Seigneur a bien mérité son triomphe. Rappelons-nous toutes les phases et toutes les étapes de sa vie terrestre. Il a quitté le trône de son Père et s’est abaissé dans le sein de la Vierge, il a été couché sur la rude paille de la crèche de Bethléem, il a dû fuir en Egypte, fuir son propre peuple; il a vécu dans l’humilité à Nazareth, comme un simple artisan; puis il s’est fatigué à parcourir la Galilée et la Judée à la recherche de la brebis perdue. Il a été méconnu, il n’a pas été aimé par ses frères. Enfin, il a enduré sa Passion rédemptrice depuis le mont des Oliviers jusqu’au Golgotha. Pourquoi tout cela ? Parce qu’il nous a aimés. Quel but poursuivait-il ? Nous racheter du pouvoir du diable et nous introduire dans la patrie céleste. Et maintenant son œuvre, à laquelle il a consacré son amour et le sang de ses veines, est achevée. Il peut, aujourd’hui, jeter un regard joyeux sur sa vie écoulée. Le Vainqueur, Notre Seigneur Jésus-Christ, s’avance triomphant, il entraîne avec lui dans son triomphe les prisonniers, c’est-à-dire nous-mêmes, les enfants de Dieu rachetés par lui; il fait part de son butin, c’est-à-dire des grâces de la Rédemption à l’Eglise. Le Fils rentre dans la maison paternelle, il est reçu avec joie par son Père; mais il lui présente des nouveaux frères et sœurs, l’humanité rachetée. Nous pouvons dire que la fête de l’Ascension est, en même temps, l’accession au trône et le couronnement du Christ comme Roi du ciel et de la terre.
Cette fête est aussi un jour de joie pour nous.
La glorification du Seigneur dans son Ascension est aussi l’élévation de la nature humaine; c’est notre glorification. Notre nature humaine participe aux plus hauts honneurs divins. Le Christ en effet, est entré au ciel avec son corps humain, avec sa nature humaine; il est assis sur le trône de Dieu et il restera avec sa nature humaine éternellement. L’un des nôtres, notre chef, est assis sur le trône de Dieu; ainsi donc nous aussi, les membres de son corps, nous sommes divinisés. C’est pourquoi la préface de la fête chante d’une manière significative: « Il a été élevé pour nous faire participer à sa divinité ».
C’est là une divine noblesse qui nous est communiquée par l’Ascension. Mais cela constitue, pour nous, une impérieuse exigence : Sursum corda. Le péché ne monte pas au ciel avec le Christ. Le péché est comme une chaîne qui nous lie à la terre. Brisons ces liens du péché. Nous devons d’abord monter au ciel avec la volonté et le désir (« demeurer de cœur au ciel »). Ensuite, nous y suivrons le Seigneur en corps et en âme.
Comme toujours, Marie doit être notre modèle. Nous devons partager, autant qu’il nous est possible, ses sentiments. Etre, nous aussi, tout entiers tournés vers le Ciel, notre vraie patrie. « La patrie, la patrie !, s’exclamait sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, Comme j’ai soif du Ciel, là où nous aimerons Jésus sans réserve ! »
En entrant au Ciel, Jésus nous en a ouvert les portes. Il est allé nous préparer une place, là où un jour, selon sa promesse, nous serons toujours avec lui. Nous devons, selon le mot de saint Paul, rechercher les choses d’en haut, où le Christ demeure assis à la droite de Dieu. Goûter les choses d’en haut, et non celles de la terre (1 Co 7, 31) : « Elle passe, la figure de ce monde ».
Vers le Ciel doit être dirigée toute notre espérance. Sainte Thérèse d’Avila en particulier était sans cesse tiraillée entre son désir de mourir, pour aller au Ciel voir son Seigneur, et le désir de rester encore à souffrir ici-bas pour sauver les âmes et acquérir ne serait-ce qu’un petit degré de gloire de plus. « Reste le désir de vivre, s’il le veut, pour mieux le servir ; et, si je pouvais contribuer à ce qu’une seule âme l’aime davantage et le loue mieux par mon intervention, ne serait-ce que pour peu de temps, cela me semblerait plus important que d’être au Ciel » (6e relation). « La bataille est brève, son but est éternel » ; « La grande affaire : le bonheur sans fin ou le malheur éternel » ; « La vie n’est qu’une nuit passée dans une mauvaise hôtellerie ». « Ce m’est une consolation d’entendre sonner l’horloge ; il me semble qu’en voyant cette heure de ma vie écoulée, je m’approche un peu plus du moment d’aller voir Dieu » (Vida, ch. 40).
Les saints nous enseignent la vanité des choses d’ici-bas. Nous aussi, nous devons, comme eux, nourrir, raviver en nous notre désir du Ciel, notre désir de devenir des saints. Rechercher les choses d’en haut. Cultivons en nous le « saint désir » (sainte Catherine de Sienne). Sainte Thérèse d’Avila a écrit sur ce thème des lignes immortelles : « Il ne faut jamais mortifier nos désirs, mais plutôt avoir confiance en Dieu. Avec notre collaboration et sa divine grâce, il nous accordera d’atteindre des sommets conquis par bien des saints » (CP, 4). « Dieu aime tant nos désirs qu’il les regarde comme déjà réalisés. »
Ravivons notre désir du Ciel. Pour cela, tournons-nous vers Notre-Dame. En elle, le désir du Ciel n’a jamais cessé de croître. Et sa course terrestre fut une accélération prodigieuse dans l’amour de Dieu.