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Année 2021-Homélie pour le 7ème dimanche de Pâques (JGA).

 

La conscience de la fragilité de notre amour pour Dieu doit nous porter à supplier le Père, à l’unisson avec le Christ, de nous garder en son Nom afin qu’aucun de nous ne se perde en choisissant la voie du mal. «Père, garde mes frères et garde moi du Mauvais».

 


«Père, je ne te prie pas de les enlever du monde, mais de les garder du Mauvais» (Jn 17, 15).
Vingt siècles que ces paroles ont été prononcées. Vingt siècles nous séparent de ces mots proférés au cours d’un ultime repas pris dans une pièce à l’abri des regards et des oreilles indiscrètes. Ces paroles sont celles que le Christ a adressées à son Père pour «les siens», «ceux», nous dit saint Jean, «qui sont dans le monde» et «qu’il aima jusqu’à l’extrême». (Jn 13, 1).

Les douze ne sont plus, pourtant ces paroles résonnent encore; c’est une prière où chaque mot sonne à nos oreilles avec une force et une intensité toujours intactes. Nous sommes ceux pour qui le Christ pria avant son supplice. Nous sommes ces hommes pour lesquels le Seigneur supplie encore son Père non «de les enlever du monde mais de les garder du Mauvais.»

Qui sont les ennemies spirituels ? Ces ennemis sont la concupiscence, le monde et le démon : la concupiscence, ennemi intérieur que nous portons toujours en nous ; le monde et le démon, ennemis extérieurs, qui attisent le feu de la concupiscence.
La concupiscence de la chair c’est l’amour désordonné des plaisirs des sens. La concupiscence des yeux comprend deux choses : la curiosité malsaine et l’amour désordonné des biens de la terre. « L’orgueil, dit Bossuet, est une dépravation plus profonde : par elle l’homme livré à lui-même, se regarde lui-même comme son dieu, par l’excès de son amour-propre».
Le monde dont il est ici question ce n’est pas l’ensemble des personnes vivant dans le monde, parmi lesquelles se trouvent à la fois des âmes d’élite et des mécréants. C’est l’ensemble de ceux qui sont opposés à Jésus-Christ et sont les esclaves de la triple concupiscence. Ce sont donc: 1) les incrédules, hostiles à la religion précisément parce qu’elle condamne leur orgueil, leur sensualité, leur soif immodérée des richesses; 2) les indifférents, qui n’ont cure d’une religion qui les obligerait à sortir de leur indolence; 3) les pécheurs impénitents qui aiment leur péché, parce qu’ils aiment le plaisir et ne veulent pas s’en détacher; 4) les mondains qui croient et même pratiquent la religion, mais en l’alliant à l’amour du plaisir, du luxe, du bien-être, et qui parfois scandalisent leurs frères, croyants ou incrédules, en leur faisant dire que la religion a peu d’influence sur la vie morale. Tel est le monde que Jésus a maudit à cause de ses scandales.
Le Diable. Saint Pierre compare le démon à un lion rugissant qui rôde autour de nous et cherche à nous dévorer.

L’objet de la prière de Jésus est des plus sérieux. Il est question du salut éternel de ceux qu’il aime. Il est question du salut de chacun d’entre nous. Et la supplication de Jésus se fait d’autant plus pressante que la possibilité de manquer le chemin du salut est bien réelle et terrible. «Père, j’ai veillé et aucun d’eux ne s’est perdu, sauf le fils de perdition» (Jn 17, 12). Celui qui a choisi de suivre le sentier de la perdition, c’est Judas. Sa mention au sein-même de la prière de Jésus n’a rien de l’anecdote. Elle est l’expression de la souffrance du Bon Berger de voir une de ces brebis s’égarer loin du royaume. Le cœur de Jésus est transpercé à la pensée que d’autres comme Judas puissent préférer les ténèbres à sa lumière.

En priant son Père qu’il nous délivre de l’influence du mal, Jésus nous dévoile la portée sa mission: sauver les hommes. « Si un homme a cent brebis et que l’une d’entre elles vienne à s’égarer, ne va-t-il pas laisser les quatre-vingt dix-neuf autres dans la montagne pour aller à la recherche de celle qui s’est égarée? » (Mt 18, 12, 14). Judas s’est engagé librement sur le chemin qui mène à la perdition. Manquer à la perfection de l’amour et à la joie éternelle promise n’est pas une pure hypothèse mais une possibilité bien réelle. Si l’un de ceux qui ont vécu au plus près du Sauveur, comme un ami partageant le même pain a pu s’égarer si loin, comment pourrions-nous ignorer notre vulnérabilité au mal? Si la liberté d’un apôtre a pu défaillir de manière si dramatique, nous avons de bonnes raisons de ne pas présumer de nos forces et de nous en remettre à la seule puissance de la grâce.

La conscience de la fragilité de notre amour pour Dieu doit nous porter à supplier le Père, à l’unisson avec le Christ, de nous garder en son Nom afin qu’aucun de nous ne se perde en choisissant la voie du mal. «Père, garde mes frères et garde moi du Mauvais».

De fait à chaque Eucharistie, l’Eglise nous presse comme une mère à réaliser l’urgence toujours actuelle du salut. A chaque fois que nos lèvres redisent le Notre Père, nous sommes conviés à unir nos voix à la supplication de Jésus pour les siens: «Notre Père qui est aux cieux… délivre nous du mal».

Tant qu’il y a aura des hommes à conduire au salut, l’Esprit-Saint n’aura de cesse de faire retentir cette supplication, avec la même force et la même intensité, comme au jour où elle est sortie du cœur du Sauveur.

Dans son livre, « Moi, le dernier exorciste », le père Amorth rapporte un dialogue saisissant qui témoigne de la force de la Vierge Marie :
Père Amorth : « Quelles sont les vertus de la Madone qui te font le plus enrager ? »
Satan : « Elle me met en colère parce qu’elle est la plus humble de toutes les créatures et parce que je suis le plus orgueilleux. Parce qu’elle est la plus pure de toutes les créatures et je ne le suis pas. Parce qu’elle est la plus obéissante à Dieu et moi, je suis le rebelle ! »
Père Amorth : « Pourquoi as-tu plus peur lorsque je dis le nom de la Madone que lorsque je dis le nom de Jésus-Christ ? »
Satan : « Parce que je suis plus humilié d’être vaincu par une simple créature que par Lui.»
Père Amorth : « Existe-t-il une quatrième qualité de la Madone qui te met en rage ? »
Satan : « Elle me défait toujours, parce qu’elle n’a jamais été effleurée par aucune tache de péché ! »
« Au cours d’un exorcisme, se souvient le père Amorth, Satan m’a dit, à travers la personne possédée : “Chaque « Je vous salue Marie » du rosaire est pour moi un coup sur la tête. Si les chrétiens connaissaient la puissance du rosaire, ce serait la fin pour moi !” »

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