Heureuse toi qui as cru.
Si l’humanité de Jésus est le lieu où Dieu se donne, Marie est le lieu où ce don est accueilli par la créature. Marie est le prototype, le modèle, le condensé de l’Eglise, c’est-à-dire de la communauté de ceux qui accueillent en Jésus le don de Dieu.
Le jour de Noel approche et la liturgie de ce quatrième dimanche de l’Avent nous offre le passage de la visitation de Marie (et de Jésus) à sa cousine Elisabeth enceinte de Jean Baptiste. Durant l’Avent, l’Eglise se presse, avec une dévotion toute spéciale, autour de l’Immaculée Mère de Dieu, parce que la première, pendant les neuf mois qu’elle porta Jésus dans son sein, elle sanctifia par son amour, par son humilité, par sa totale consécration à Jésus, ce temps de joyeuse attente et de préparation à la naissance du Fils de Dieu. En contemplant notre Sainte Mère enceinte méditons sur la présence de Dieu parmi nous.
Dieu veut habiter en nous.
Tel est le désir de Jésus: demeurer chez nous (cf. Lc 19,5).Tel est, depuis toujours, le désir de Dieu: faire sa demeure parmi nous. Ou mieux: faire sa demeure en nous (Jn 14, 23). Habiter en moi comme l’ami habite dans le cœur de son ami. Etre connu de moi, être aimé de moi, comme lui-même me connaît et m’aime. C’est cela l’amitié. C’est cela la charité. Dieu veut donc habiter en nous. Il veut prendre possession de notre humanité pour la transfigurer par sa divinité. Le jour de l’incarnation cette œuvre franchit une étape décisive: «Le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous et nous avons vu sa gloire» (Jn 1, 14). Déjà un homme est Dieu.
Dieu l’avait prévu depuis longtemps.
Cette épiphanie, cette manifestation de Dieu dans la chair, était prévue de longue date, car notre Dieu n’agit ni à l’improviste ni au coup par coup. Aussi, pour préparer les cœurs au mystère de l’incarnation, Dieu avait-il déjà choisi, dans l’ancienne alliance, de manifester sa présence de manière plus intense en certains lieux privilégiés. Ces «lieux saints» sont, pour nous chrétiens, comme autant d’annonces et de préfigurations de Jésus-Christ: le buisson ardent (Ex 3); la montagne sainte du Sinaï, toute fumante du feu de Dieu (Ex 19, 18); la Cité sainte, Jérusalem, «le lieu de son repos» (Ps 131, 14); «le mont Sion où il fit sa demeure» (Ps 74, 2); le Temple, demeure de sa gloire; mais aussi l’arche de l’alliance, signe rayonnant de sa présence. «C’est là que je te rencontrerai», dit Dieu à Moïse (Ex 25, 22).
Toutes ces figures trouvent leur réalisation dans la sainte humanité de Jésus. Mais elles éclairent aussi d’une lumière incomparable le mystère de la Vierge Marie.
Car, si l’humanité de Jésus est le lieu où Dieu se donne, Marie est le lieu où ce don est accueilli par la créature. En ce sens, Marie est le prototype, le modèle, le condensé, de l’Eglise, c’est-à-dire de la communauté de ceux qui accueillent en Jésus le don de Dieu.
Dieu veut habiter parmi nous et c’est pourquoi Jésus nous demande à nous aussi d’accueillir chez nous Marie. «Voici ta Mère» (Jn 19, 27), dit-il à Jean au pied de la Croix, et dès cette heure là, le disciple bien aimé la prit chez lui. Prendre Marie chez soi, c’est penser à elle, l’aimer, la prier. C’est se mettre à son école, devenir vraiment ses fils. C’est faire siennes ses dispositions intérieures, regarder Jésus avec ses yeux à elle, s’imprégner de son esprit par la prière du Rosaire par exemple. La vraie dévotion à Marie, celle qui ne détourne pas de Jésus mais y conduit, n’est pas une option ou un appendice baroque qui viendrait défigurer le bel édifice de la vie chrétienne dont Jésus est la pierre d’angle. Non, elle est le chemin royal pour apprendre à accueillir vraiment Jésus-Christ. Car c’est en Marie, l’Evangile le souligne, que l’on rencontre vraiment Jésus. Dès cette nuit, les bergers «viendront en hâte et trouveront Marie, Joseph et le nouveau-né couché dans la crèche» (Lc 2, 16). Plus tard, quand les Mages verront «l’enfant avec Marie sa mère» (Mt 2, 11). Il n’y a donc pas à chercher Jésus ailleurs qu’auprès de Marie, au sein de cette Eglise dont elle est le modèle et déjà la plus belle réalisation.
« »Heureuse, lui dit Élisabeth, toi qui as cru« . Bienheureux vous aussi qui avez entendu et qui avez cru ; car toute âme qui croit, conçoit et engendre le Fils de Dieu, et mérite de connaître ses œuvres. S’il n’y a, selon la chair, qu’une seule mère du Christ, tous engendrent le Christ selon la foi» (Saint Ambroise, Sermon sur l’Evangile selon St. Luc).