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Année 2021- Homélie pour le 25ème dimanche du temps ordinaire (JGA).

Le chemin de l’enfance spirituelle.
Le texte de l’Evangile nous présente l’accueil de l’enfant comme le chemin pour vivre l’enfance spirituelle à la suite de Jésus.
Cette attitude d’enfance spirituelle, c’est par excellence dans la prière que nous sommes appelés à la recevoir. Etre avec Dieu comme un enfant dans les bras de son père ou sa mère.

 


Deux chemins se croisent et s’opposent dans l’Evangile de ce jour : tandis que Jésus se prépare à un chemin qui descend au plus bas, les apôtres, par deux fois, rêvent de grandeur et de sommets.

Cette distance douloureuse entre le Christ et les disciples se répète aujourd’hui ; il suffit de considérer l’écart qui sépare nos préoccupations humaines de ce que devrait être la vraie vie d’un chrétien. Le Christ nous propose le même remède qu’aux disciples : l’enfance spirituelle, qui va permettre de le rejoindre dans le mystère de sa Croix et de sa résurrection.

Le petit enfant que Jésus place au milieu du groupe des apôtres pour les rappeler à une attitude d’humilité constitue d’abord une évocation de Jésus lui-même : « Celui qui accueille un enfant, c’est moi qu’il accueille. » Jésus se présente donc sous les traits d’un enfant, comme il se présente aussi sous ceux du pauvre (cf. Mt 25). Ces deux figures constituent un seul et même mystère, celui du dépouillement de Dieu. Jésus est simple, confiant, dépendant de l’amour de son Père …et du nôtre. Tout au long de l’Evangile, Jésus est celui qui demeure semblable à un enfant : dans son abaissement, dans son être-Fils.

En s’abaissant, tout d’abord : Jésus est celui qui, Lumière née de la Lumière, descend : dans la chair humaine, dans le sein de la Vierge, dans l’humble bourgade de Galilée, dans le Jourdain où affluent les pénitents, dans le désert où rôde le tentateur. Il est celui qui quitte la gloire du ciel pour se faire petit auprès des humbles, mais aussi des puissants dont il endure l’arrogance et la résistance intérieure. Il descend ensuite dans la vallée du Cédron, le jardin de Gethsémani et dans la nuit du tombeau avant d’être exalté à l’Ascension. La vie spirituelle est un chemin de dépouillement humain. Acceptons-nous d’être abaissés, de nous faire petits ? Pour le savoir, nous pouvons nous interroger sur notre manière de prendre les contrariétés et humiliations ordinaires, dans le travail, la vie sociale ; sur notre besoin de reconnaissance humaine ; sur la manière dont nous supportons que d’autres soient favorisés, préférés.

D’autre part, Jésus se fait enfant en se définissant comme Fils. C’est le Père qui affirme le premier cette filiation, lorsque s’ouvrent les Cieux au-dessus du Jourdain : « tu es mon fils bien aimé ; en toi je trouve ma joie » (Mc 1,11). Cette relation le pousse à adhérer parfaitement à la volonté du Père. L’obéissance de Jésus n’est pas celle de l’esclave craintif mais du Fils aimant et confiant qui s’offre ; elle le pousse à dire: «Abba, Père » (Mc 14, 38). Et nous ? Comme le Fils unique, nous sommes appelés à grandir toujours plus dans la dépendance au Père. Cette relation est-elle essentielle pour nous ou revendiquons-nous une large autonomie ?

Le texte de l’Evangile nous présente l’accueil de l’enfant comme le chemin pour vivre l’enfance spirituelle à la suite de Jésus. Le Christ y répète quatre fois le verbe « accueillir », qui est central dans l’attitude spirituelle du chrétien.

 

Nous trouvons dans tant de femmes, spécialement dans leur vocation à la maternité (naturelle et surnaturelle), des exemples merveilleux de ce cœur accueillant. Ecoutons le pape Jean-Paul II décrire cette réalité si belle : « La mère accueille et porte en elle un autre, elle lui permet de grandir en elle, lui donne la place qui lui revient en respectant son altérité. Ainsi, la femme perçoit et enseigne que les relations humaines sont authentiques si elles s’ouvrent à l’accueil de la personne de l’autre, reconnue et aimée pour la dignité qui résulte du fait d’être une personne et non pour d’autres facteurs comme l’utilité, la force, l’intelligence, la beauté, la santé. »(Jean-Paul II, Evangelium Vitae, nº99).

Sur le plan spirituel, tout chrétien est appelé, comme Marie lors de l’Annonciation, à accueillir en lui et à laisser grandir Jésus qui se fait petit mais est plus grand que nous.

Cette attitude d’enfance spirituelle, c’est par excellence dans la prière que nous sommes appelés à la recevoir. Etre avec Dieu comme un enfant dans les bras de son père ou sa mère. Recherchons ces moments où nous pouvons simplement dire au Seigneur : « je suis pauvre, je n’y arrive pas, je m’en remets à toi » ; ou bien : « je suis joyeux, je sais que tout cela vient de toi, je te remercie » ; ou encore : « reste avec moi, je ne comprends pas mais j’accepte, éclaire-moi, aide-moi ».

« Celui qui accueille un enfant comme celui-ci, c’est moi qu’il accueille ». Accueillir le Christ, cela peut nous sembler très naturel, à nous qui cherchons sincèrement à le suivre. Il apporte joie et libération et illumine nos vies. Ce n’est pourtant pas toujours si simple. Accueillir le Christ, c’est bien sûr accueillir l’ange de l’Annonciation et la crèche, mais c’est aussi accueillir la Croix. Marie l’a vécu la première. A nous aussi il est demandé d’accueillir le Christ angoissé à Gethsémani, le Christ outragé, défiguré, écrasé sous le poids de la Croix, supplicié sur le bois, puis finalement ressuscité. Mesurons-nous la portée de ces mots ? Voici ce que François de Sales écrivait, sans ménagement, à Jeanne de Chantal : « Vous voulez bien avoir une croix, mais vous voulez avoir le choix ; vous la voudriez commune, corporelle et de telle ou telle sorte. Et qu’est-ce cela, ma fille très aimée ? Ah non, je désire que votre croix et la mienne soient entièrement croix de Jésus-Christ [Jn 19,25]. »(Saint François de Sales, lettre à sainte Jeanne de Chantal du 21 novembre 1604, DDB 2016, p. 93-94).

Nous pouvons conclure notre méditation par cette belle prière d’abandon de Madame Elisabeth (sœur de Louis XVI), dont la cause de béatification vient d’être ouverte : « Que m’arrivera-t-il aujourd’hui, ô mon Dieu, je l’ignore. Tout ce que je sais, c’est qu’il ne m’arrivera rien que vous ne l’ayez prévu de toute éternité. Cela me suffit, ô mon Dieu, pour être tranquille. J’adore vos Desseins éternels, je m’y soumets de tout mon cœur. Je veux tout, j’accepte tout, je vous fais un sacrifice de tout ; j’unis ce sacrifice à celui de votre cher Fils, mon Sauveur, vous demandant, par son Sacré-Cœur et par ses mérites infinis, la patience dans mes maux et la parfaite soumission qui vous est due pour tout ce que vous voudrez et permettrez. ( https://www.famillechretienne.fr/foi-chretienne/saints-et-temoins-de-la-foi/la-priere-d-abandon-de-madame-elisabeth-236330 ).

Ainsi soit-il.

 

 

 

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