Je suis le pain de la vie.
« Amen, amen, je vous le dis : il a la vie éternelle, celui qui croit. Moi, je suis le pain de la vie. Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel: si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde ».
Au cours de son dialogue avec les membres de la synagogue de Capharnaüm, Jésus dévoile pas à pas le mystère eucharistique. Le chapitre 6 de saint Jean est comme un grand parcours de foi ascendant : en partant du miracle des pains, le Christ prépare progressivement ses auditeurs – nous-mêmes – à découvrir toute la profondeur du mystère eucharistique. De manière très pédagogique il dirige peu à peu notre regard vers les profondeurs du Sacrement d’amour, vers le Sacrement de sa présence réelle.
Rappelons brièvement l’enseignement du Catéchisme de l’Eglise sur l’Eucharistie, Corps du Christ, notre Pain de Vie :
« Le mode de présence du Christ sous les espèces eucharistiques est unique. Il élève l’Eucharistie au-dessus de tous les sacrements et en fait « comme la perfection de la vie spirituelle et la fin à laquelle tendent tous les sacrements » (Saint Thomas d’Aquin, s. th. 3, 73, 3). Dans le très saint sacrement de l’Eucharistie sont » contenus vraiment, réellement et substantiellement le Corps et le Sang conjointement avec l’âme et la divinité de notre Seigneur Jésus-Christ, et, par conséquent, le Christ tout entier » (Cc Trente : DS 1651) » Cette présence, on la nomme ‘réelle’, non à titre exclusif, comme si les autres présences n’étaient pas ‘réelles’, mais par excellence parce qu’elle est substantielle, et que par elle le Christ, Dieu et homme, se rend présent tout entier » (MF 39). C’est par la conversion du pain et du vin au Corps et au Sang du Christ que le Christ devient présent en ce sacrement. Le Concile de Trente résume la foi catholique en déclarant : » Parce que le Christ, notre Rédempteur, a dit que ce qu’il offrait sous l’espèce du pain était vraiment son Corps, on a toujours eu dans l’Eglise cette conviction, que déclare le saint Concile de nouveau : par la consécration du pain et du vin s’opère le changement de toute la substance du pain en la substance du Corps du Christ notre Seigneur et de toute la substance du vin en la substance de son Sang ; ce changement, l’Eglise catholique l’a justement et exactement appelé transsubstantiation » (DS 1642). La présence eucharistique du Christ commence au moment de la consécration et dure aussi longtemps que les espèces eucharistiques subsistent. Le Christ est tout entier présent dans chacune des espèces et tout entier dans chacune de leurs parties, de sorte que la fraction du pain ne divise pas le Christ (cf. Cc. Trente : DS 1641) ».
Mais peut être vous étonnez vous du fait que l’Eucharistie que vous recevez souvent ne vous transforme toujours pas, que ce sacrement ne vous apporte pas de résultats visibles. Pourquoi ? Comment faire pour recevoir l’Eucharistie avec fruit? Il nous faut nous préparer ! Tout comme la venue de Jésus à la Nativité est précédée de l’attente de l’Avent, sa venue dans l’Eucharistie doit également être attendue. Jésus descend continuellement sur l’autel, il y nait, et sa naissance sur l’autel devrait également être précédée d’un «avent eucharistique». L’avent eucharistique, c’est avant tout une attitude de foi, c’est la foi en l’amour de Jésus qui nous attend. Il est si important que nous croyons que Jésus désire venir dans notre cœur, qu’il désire la célébration de l’Eucharistie, qu’il attend notre Sainte Communion parce qu’il veut se donner pleinement à nous par le Saint Sacrement, la source principale des grâces.
Comment faire donc pour recevoir l’Eucharistie avec fruit ? Il nous faut nous préparer! Saint François de Sales s’efforçait de se préparer à la sainte messe toute la journée. L’Eucharistie est l’expression de la folie du Christ, de son amour fou de l’homme, de son amour pour nous. Mais le Sacrifice du Christ, l’Eucharistie, n’est efficace que pour ceux qui s’associent par la foi et l’amour à la Passion du Christ, écrit saint Thomas d’Aquin. Plus il y a en nous de foi et d’amour, plus l’Eucharistie est efficace dans notre vie. Recevoir le Christ dans l’Eucharistie fait fusionner notre être avec celui du Christ. Saint Cyrille d’Alexandrie comparait ce phénomène avec «de la cire fondue qui se mélange au reste de la cire». Bossuet disait : «l’œuvre de notre salut se consomme dans l’Eucharistie, en mangeant la chair du Sauveur. Il y faut apporter la foi ; car c’est par là qu’il commence : il faut croire en Jésus-Christ qui donne sa chair à manger». La foi est donc la première condition pour recevoir avec fruit l’Eucharistie.
Quelles autres dispositions nous sont nécessaires pour recevoir avec fruit l’Eucharistie ? L’état de grâce. Le Christ annonce qu’il nous donnera son corps et son sang en nourriture et breuvage spirituels. Or, on ne donne pas de nourriture à des morts ; la réception de l’Eucharistie suppose donc bien dans l’âme la vie de la grâce, et elle l’y accroît. Saint Paul rappelle vivement aux Corinthiens la nécessité de la pureté de l’âme pour recevoir ce sacrement: «Qui mange ce pain ou boit ce calice indignement, est justiciable du corps et du sang du Seigneur. Que l’homme s’éprouve donc lui même» (1 Cor. 11, 27-28) avant de communier ! Et saint Ambroise de Milan: «Te voilà pur de tout péché, puisque tes fautes ont été effacées ; aussi le Seigneur te juge-t-il maintenant digne des sacrements célestes et t’invite à ce céleste festin » (L. 5, c. 2, n. 6). D’où la nécessité de se confesser régulièrement, ou au moins dès qu’on a commis un péché mortel.
L’intention droite: communément définie comme le désir de plaire à Dieu et de devenir meilleur. Demandons-nous également si nous aurions le droit de dire avec saint Pierre: «Seigneur, vous savez que je vous aime !». Le catéchisme du Concile de Trente pose comme condition « absolument indispensable, de nous demander à nous-mêmes si nous sommes en paix avec les autres, si nous aimons notre prochain sincèrement et du fond du cœur ». Rappelons nous les paroles de Jésus: «Si en offrant votre don à l’autel, vous vous souvenez que votre frère a quelque chose contre vous, laissez-là votre don devant l’autel, et allez vous réconcilier avec votre frère, puis après vous viendrez faire votre offrande » (Mt 5, 23).
Notre corps étant appelé à devenir le tabernacle vivant, il convient de marquer le respect dû à l’hôte divin en observant les conditions suivantes: être à jeun, aujourd’hui nous ne sommes tenus qu’à une heure de jeûne et avoir une tenue correcte et une attitude respectueuse, en recevant de préférence la Sainte Hostie à genoux et dans la langue pour qu’aucune miette du Corps du Christ ne tombe par terre.
Enfin, après avoir communié, restons quelques minutes en actions de grâces, dans un dialogue d’amour avec l’Ami. En ce moment nous pouvons dire comme saint Claude de la Colombière : «Vous êtes bien bon, mon Dieu, de vous communiquer avec tant de bonté à la plus ingrate de vos créatures et au plus indigne de vos serviteurs. Soyez-en loué et béni éternellement ! ». Du respect de ces conditions, nos communions seront plus ou moins fructueuses.
Pour conclure notre méditation, cette prière de saint Thomas d’Aquin, peut nous aider à adopter l’attitude intérieure qui convient : confiance, docilité, abandon face à l’Eucharistie :
« Dieu tout-puissant et éternel, voici que je m’approche du sacrement de votre fils unique Notre Seigneur Jésus-Christ. Malade, je viens au médecin dont dépend ma vie ; souillé, à la source de la miséricorde ; aveugle, au foyer de la lumière éternelle ; pauvre et dépourvu de tout, au Maître du Ciel et de la terre. J’implore donc votre immense, votre inépuisable générosité, afin que vous daigniez guérir mes infirmités, laver mes souillures, illuminer mon aveuglement, combler mon indigence, couvrir ma nudité ; et qu’ainsi je puisse recevoir le Pain des Anges, le Roi des rois, le Seigneur des seigneurs, avec toute la révérence et l’humilité, toute la contrition et la dévotion, toute la pureté et la foi, toute la fermeté de propos et la droiture d’intention que requiert le salut de mon âme. Donnez-moi, je vous prie, de ne pas recevoir simplement le sacrement du Corps et du Sang du Seigneur, mais bien toute la vertu et l’efficacité du sacrement. Ô Dieu plein de douceur, donnez-moi de si bien recevoir le Corps de votre Fils Unique, Notre Seigneur Jésus-Christ, ce corps charnel qu’il reçut de la Vierge Marie, que je mérite d’être incorporé à son Corps Mystique et compté parmi ses membres. Ô Père plein d’amour, accordez-moi que ce Fils Bien-Aimé que je m’apprête à recevoir maintenant sous le voile qui convient à mon état de voyageur, je puisse un jour le contempler à visage découvert et pour l’éternité, Lui, qui, étant Dieu, vit et règne avec vous dans l’unité du Saint-Esprit, dans les siècles des siècles ».
Ainsi soit-il.