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Année 2021-Homélie pour la solennité du Christ Roi de l’univers (JA).

Le Christ Roi de l’univers.
Jésus règne sur les âmes d’abord d’une royauté de nature, parce qu’il est le Verbe qui illumine tout homme venant en ce monde, et que la création tout entière est marquée d’un sceau divin. Ensuite d’une royauté de conquête, de par l’œuvre de la rédemption.


En cette solennité du Christ Roi considérons brièvement quelques attributs de cette royauté de Jésus-Christ.

La royauté de Jésus-Christ est mystérieuse parce que lui-même est Dieu, et Dieu reste toujours mystérieux à nos intelligences. De cette manière aucun modèle de royauté sur terre ne suffit à nous faire comprendre la royauté de Jésus-Christ. Cette dernière les dépasse toutes… Nous ne parlons de la royauté du Seigneur Jésus-Christ que pour souligner le caractère divin et transcendant qui s’attache à sa personne et au mystère de son gouvernement, dont nulle seigneurie terrestre ne nous donnera jamais l’idée.

La royauté de Jésus-Christ est universelle. Il faut aussi admettre que la royauté de l’Homme-Dieu s’étend sur l’œuvre immense de l’univers cosmique. Le monde n’a été fait que pour nous parler de lui. Il est le Verbe qui a organisé le chaos primordial, le Rédempteur qui restaure toutes choses dans le mystère d’une plus haute harmonie. Le Christ, parce qu’il est roi universel, jugera les vivants et les morts, disons-nous dans le Credo.

La royauté est intérieure. Jésus cherche d’abord à régner dans le secret de l’âme. Il s’approche de sa créature et lui murmure : « Mon enfant, donne-moi ton cœur »… La royauté du Seigneur Jésus est chose douce et intérieure, elle s’adresse d’abord de l’âme à l’âme pour nous introduire dans l’intimité des Personnes Divines. Le Christ tout-puissant exerce la royauté en mendiant d’amour. « Si tu savais le don de Dieu et quel est celui qui te parle », dit-il à la Samaritaine.
Le signe de sa royauté c’est le cœur surmonté d’une croix. La dévotion au Christ-Roi et la dévotion au Sacré-Cœur, c’est tout un. Cette dévotion nous veut humbles, aimants et contemplatifs, désireux d’offrir un cœur totalement soumis au joug suave dont parle l’Evangile pour être conduits dans l’intimité du Père par la ressemblance du Fils.
Un passage du début de l’Evangile de saint Jean nous fait saisir le lien entre contemplation et royauté (être contemplatif et laisser régner Jésus sur notre cœur). Jésus, apercevant Nathanaël, déclare: « Voici un Israélite dont l’âme est sans détour ». Nathanaël sent le regard du Maître pénétrer jusqu’au fond de son âme ; c’est là un événement très mystérieux et très intérieur qui le fait s’écrier dans un transport : « Rabbi, vous êtes le Fils de Dieu, vous êtes le roi d’Israël »… Vous êtes mon roi. L’affirmation de la royauté est liée à la grâce d’un regard contemplatif.
En revanche, lorsque les Juifs, séduits par le miracle de la multiplication des pains, veulent enlever Jésus pour le faire roi, il s’échappe de leurs mains et s’enfuit. Parce qu’ils ont voulu en faire un messie politique, de leur politique à eux, raciale, étroite et fermée sur elle-même. Il n’en faut pas plus pour nous convaincre que Jésus-Christ veut d’abord et essentiellement régner dans les âmes d’une royauté d’amour, intérieure et universelle.
Du ciel où Il est remonté, c’est encore par sa très douce royauté que Dieu touche le monde : le règne de Jésus ici-bas consiste à étendre, à porter jusqu’au plus lointain et au plus misérable d’entre nous les rayons et les ardeurs de sa charité.
Un sermon de Bossuet illustre parfaitement le caractère profondément spirituel de cette royauté. Il dit : « C’est le propre des rois de sauver ! C’est pourquoi le prince Jésus, en venant en ce monde, considérant que les prophéties lui promettent l’empire de tout l’univers, ne demande point à son Père une maison riche et magnifique, ni des armées grandes et victorieuses, ni enfin tout ce pompeux appareil dont la majesté royale est environnée. Ce n’est pas ce que je demande, ô mon Père ! Je demande la qualité de sauveur et l’honneur de délivrer mes sujets de la misère, de la servitude, de la damnation éternelle. Que je sauve seulement et je serai roi. Ô aimable royauté du Sauveur des âmes ! » (Deuxième sermon pour la Circoncision).
Ainsi Jésus règne sur les âmes d’abord d’une royauté de nature, parce qu’il est le Verbe qui illumine tout homme venant en ce monde, et que la création tout entière est marquée d’un sceau divin. Ensuite d’une royauté de conquête, de par l’œuvre de la rédemption. Tout homme apparaît désormais comme recouvert du sang du Christ, comme l’heureux captif d’une bataille sanglante, marqué pour toujours du signe de la croix rédemptrice qui est l’arme d’un roi vainqueur. Pouvoir faire le signe de la croix sur nous-mêmes voilà notre seule fierté : rachetés par le Christ, conquis par le Fils de Dieu et Fils de Marie.

La royauté est sociale. S’il est vrai que la royauté de Jésus nous convie d’abord à une aventure intérieure où se fait entendre l’appel du silence et de l’amour, s’ensuit il qu’il faille soustraire à l’autorité royale du Fils de Dieu ce qui est du domaine de l’art, de la culture, l’immense déploiement de la vie sociale, l’administration, les lois, les décrets des parlements ? Nous ne pouvons l’admettre sans pécher gravement contre Dieu et contre les hommes.
Contre Dieu d’abord, qui mérite infiniment, de par sa propre excellence, que tout lui soit soumis et consacré, et que soient reconnus publiquement ses droits souverains sur la vie des sociétés. Il est blasphématoire d’organiser la vie sociale sans tenir compte de ses droits souverains sur les sociétés.
Contre l’homme ensuite, qui se voit privé de la direction et de la protection de son divin souverain, le seul à pouvoir lui offrir le bonheur sans fin, pour se retrouver victime d’un misérable tyran.
L’adversaire numéro un de cette royauté sociale de Jésus-Christ est justement le laïcisme, condamné par le pape Pie XI dans sa magistrale encyclique « Quas primas ». Il ne s’agit évidemment pas de cette saine laïcité qui n’est que la reconnaissance de l’autonomie des laïcs dans leur sphère propre, mais d’une volonté des Etats de se situer hors de toute dépendance envers le Créateur. Le laïcisme ainsi ne peut que détruire l’homme en le détachant de son Créateur et de son Roi.

Que Marie Reine intercède pour nous afin que nous devenions des fidèles sujets de notre doux et humble Roi, son Fils, Jésus-Christ.

Ainsi soit-il.

 

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