C’est la moisson, c’est le jugement final qui séparera le blé de l’ivraie, qui séparera ceux qui ont fait le bien de ceux qui ont fait le mal, qui récompensera les premiers et qui ne laissera pas les autres sans le châtiment mérité.
Source: Homélies du père Jacques Fournier-19 07 2020.
Dimanche dernier la liturgie proposait à notre réflexion la parabole du semeur, qui appelait notre attention sur les dispositions nécessaires pour que la Parole de Dieu produise des fruits dans notre vie.
Dans la continuité de celle-ci Jésus raconte cette autre parabole que nous avons entendue aujourd’hui : celle du blé et de l’ivraie. Et ici encore à la demande de ses disciples il en donne la signification:
dans cet Evangile Jésus nous exhorte à la patience et à l’espérance et en même temps il nous appelle à la conversion et à nous garder du mal, car à la fin ceux qui ont fait le mal seront jetés « dans la fournaise » où « il y aura des pleurs et des grincements de dents ».
Devant le mal qui ravage le monde nous sommes souvent amenés à penser : pourquoi Dieu n’intervient-il pas ? Le mal qui se trouve dans le monde semble remettre en cause la bonté de Dieu voire même, selon certains, son existence.
Le problème du mal est sans doute la plus grande objection que l’homme élève contre Dieu. Nous le savons spécialement au travers du Livre de Job dans la Sainte Ecriture. Chacun de nous, un jour ou l’autre, souffre dans sa chair par la maladie, dans son cœur par des blessures d’amour, dans sa conscience à cause du péché, dans sa famille, son travail et dans le monde entier par les difficultés des relations humaines.
Enfin la mort, pour tous, est le moment le plus douloureux, quand un être aimé disparaît de notre vie. Cette fracture inévitable et universelle est vécue comme une souffrance pour ceux qui restent, même si, dans la foi, nous savons qu’après la mort il y a la vie éternelle.
Pourquoi y a-t-il tant de mal dans le monde ? Pourquoi Jésus en venant dans le monde n’a-t-il pas balayé d’un seul coup toute souffrance et tout péché hors de ce monde ? Alors beaucoup vont jusqu’à dire : « S’il y avait un Dieu bon, tout cela n’existerait pas ».Une réponse nous est donnée dans la parabole du blé et de l’ivraie.
Dans le monde le Christ sème le bon grain en vue de la moisson future. La moisson c’est ce qui donne place à la gloire éternelle, au bonheur, à la joie sans fin. Mais un ennemi, le diable, qui peut prendre des visages différents selon les temps, y sème l’ivraie en vue de compromettre les bons fruits de la moisson.
Dans les paroles de Jésus nous trouvons d’abord une réponse qui porte sur l’origine du mal. Le mal ne vient pas de Dieu, qui n’a semé que du bon grain dans le monde. Tout est bon dans la Création nous dit le livre de la Genèse : « et Dieu vit que cela était bon » … et même « très bon ».
Le mal ne vient pas de Dieu, il ne vient pas non plus du cœur de l’homme, créé par Dieu à son image. Il vient de celui que Jésus appelle « l’Ennemi ».
Il y a en effet deux semeurs: le premier, Jésus, sème en plein jour et en toute clarté ce qui est bon ; le deuxième, le diable, qui est menteur et père du mensonge, survient « de nuit pendant que les gens dorment » pour semer le mal, voilà le prince des ténèbres.
La question qui se pose alors c’est pourquoi Dieu permet le mal ? Pourquoi la coexistence du bien et du mal ? C’est la question que les serviteurs ont posé au maitre du champ.
« Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson » a répondu le maitre. Cette consigne de « laisser pousser ensemble le blé et l’ivraie » peut nous sembler choquante… Mais faisons confiance à Dieu, maitre du champ, car dans sa toute-puissance et sagesse infinie Il dirige tout « en bien de ceux qui aiment Dieu ».
Dans nos propres vies et dans le monde, il y a un mélange de bon et de mauvais. La grâce de Dieu d’une part et le péché d’une autre combattent mystérieusement en nos cœurs. « Je ne fais pas le bien que je voudrais faire, avoue saint Paul, et je commets le mal que je ne voudrais pas faire » (Romains 7, 19).
Personne n’est tout bon ni tout mauvais. Même chez ceux dont la vie nous paraît n’être qu’un champ d’ivraie, Dieu nous demande de découvrir le blé qui peut y pousser et qu’il veut engranger dans son grenier.
Il nous faut donc croire à la miséricordieuse patience de Dieu, comme le dit la première lecture de ce dimanche : « à tes fils tu as donné une belle espérance : après la faute tu accordes la conversion » (Sagesse 12. 19). L’histoire est remplie de grands pécheurs qui sont devenus des saints.
Reste aussi à calmer notre impatience et à laisser le semeur lui-même opérer le tri que nous prétendons faire, avant l’heure et à sa place, selon nos propres jugements et nos propres décisions. « Ne jugez pas », nous a souvent répété Jésus.
C’est la moisson, c’est le jugement final qui séparera le blé de l’ivraie, qui séparera ceux qui ont fait le bien de ceux qui ont fait le mal, qui récompensera les premiers et qui ne laissera pas les autres sans le châtiment mérité.
Demandons au bon Jésus la grâce de pouvoir travailler d’abord et avec zèle à notre propre conversion et ensuite à celle de tous les hommes. Et que la Vierge Marie intercède pour nous tous.
Ainsi soit-il.