« Je t’adore dévotement, Dieu caché Qui sous ces apparences vraiment prends corps, à Toi, mon cœur tout entier se soumet parce qu’à te contempler, tout entier il s’abandonne. La vue, le goût, le toucher, en toi font ici défaut, mais t’écouter seulement fonde la certitude de foi. Je crois tout ce qu’a dit le Fils de Dieu, Il n’est rien de plus vrai que cette Parole de vérité ». (Adoro Te devote).
L’apôtre saint Paul nous enseigne que ceux qui ne discernent point le Corps de Notre- Seigneur, commettent un grand crime (1Co 11, 27-30). Nous devons donc faire un effort pour élever ici notre esprit au-dessus des choses sensibles. Si une personne se persuadait que le sacrement de l’Eucharistie ne contient que ce que les sens y aperçoivent, elle tomberait fatalement dans cette impiété énorme de croire qu’il ne renferme que du pain et du vin, puisque les yeux, le toucher, l’odorat, le goût ne rapportent que des apparences de pain et de vin. Il faut donc renoncer au jugement des sens, pour s’élever uniquement à la contemplation de la Vertu et de la Puissance infinie de Dieu; car la Foi catholique enseigne et croit, sans hésitation aucune, que les paroles de la Consécration produisent spécialement trois effets admirables.
Le premier, c’est que le vrai corps de Notre-Seigneur Jésus-Christ, Celui-là même qui est né de la Vierge Marie, qui est assis à la droite du Père, est contenu dans l’Eucharistie. Notre Sauveur, en effet, a dit : « Ceci est mon Corps, ceci est mon Sang ». Or, il n’est personne de bon sens qui ne comprenne immédiatement ce que ces paroles signifient : d’autant plus qu’il est ici question de la nature humaine, et qu’il est hors de doute, dans la Foi catholique, que Jésus-Christ était véritablement homme. Aussi saint Hilaire, parlant de la présence réelle de la Chair et du Sang de Jésus-Christ, a-t-il dit nettement : « qu’il est impossible pour nous de douter de cette vérité, puisque Jésus-Christ a déclaré lui-même, et que la Foi nous enseigne, que sa Chair est vraiment une nourriture ». Et Saint Ambroise : « Avant la Consécration, il n’y a que du pain, mais après la Consécration, il n’y a que la Chair de Jésus-Christ ». L’Eucharistie ne contient pas seulement le Corps de Jésus-Christ avec tout ce qui constitue un corps véritable, comme les os et les nerfs, mais encore Jésus-Christ tout entier, c’est à dire : corps, sang, âme et divinité. Jésus-Christ est tout entier donc dans chacune des espèces du pain et du vin, et Il est aussi tout entier dans la moindre parcelle de chaque espèce. « Chacun reçoit Jésus-Christ, écrivait saint Augustin, et Jésus-Christ est tout entier dans la portion de chacun; Il ne se divise pas entre tous, mais il se donne tout à tous».
Le second c’est que dans le Sacrement il ne reste rien de la substance des deux éléments, quoique cela semble tout-à-fait opposé et contraire au rapport des sens. « Nous le déclarons sans hésiter, dit saint Augustin, avant la Consécration, il n’y a que le pain et le vin formés par la nature ; mais après la Consécration, il n’y a plus que la Chair et le Sang de Jésus-Christ, rendus présents par les paroles sacrées». «Le Corps de Notre-Seigneur, dit de son côté Saint Jean Damascène, Celui-là même qui est né d’une Vierge, est véritablement uni dans l’Eucharistie à sa divinité; non qu’Il descende du ciel où Il est monté, mais parce que le pain et le vin sont transsubstantiés au Corps et au Sang du Seigneur». C’est donc avec beaucoup de raison et de justesse que l’Eglise catholique appelle ce merveilleux changement transsubstantiation, comme l’enseigne le Concile de Trente.
Le troisième, qui se déduit aisément des deux autres et qui est positivement exprimé par les paroles de la Consécration, c’est que par une disposition inexplicable et toute miraculeuse, les accidents qui apparaissent aux yeux, et que les autres sens perçoivent aussi, se soutiennent sans le secours d’aucun sujet. Ils présentent encore toutes les apparences du pain et du vin. Mais ils ne tiennent à aucune substance ; ils subsistent par eux-mêmes. Quant à la substance même du pain et du vin, elle est tellement changée au Corps et au Sang de Jésus-Christ, qu’il n’en reste absolument rien, et qu’il n’y a réellement plus ni substance du pain, ni substance du vin. Comme il répugne absolument à la nature de manger la chair et de boire le sang de l’homme, c’est une grande marque de Sagesse de la part de Notre-Seigneur de nous avoir donné sa Chair et son Sang adorables sous les apparences du pain et du vin, qui sont notre nourriture journalière, la plus ordinaire, et en même temps la plus agréable. Nous trouvons encore en cela deux autres avantages; le premier, c’est d’être à l’abri d’accusations calomnieuses, et qu’il nous eut été difficile d’éviter de la part des infidèles, s’ils nous avaient vus manger la Chair de Jésus-Christ dans sa propre forme. Le second, c’est qu’en prenant le Corps et le Sang de Notre- Seigneur, sans que nos sens puissent saisir la réalité de leur existence, c’est un puissant moyen d’augmenter la Foi dans nos âmes. « Car la Foi, dit saint Grégoire, ne mérite plus, quand la raison démontre».
Pour aider notre foi qui reste toujours faible et fragile Notre Seigneur a voulu faire des miracles eucharistiques, depuis le premier à Lanciano vers l’année 700, jusqu’à nos jours ils sont nombreux les prodiges qui nous permettent de voir de manière visible ce qui arrive de manière invisible à chaque sainte messe. Je voudrais partager avec vous un miracle eucharistique qui a eu lieu en Pologne en 2013.
C’était lors de la messe de Noël 2013, dans l’église Saint-Hyacinthe, à Legnica, ville polonaise en Basse-Silésie. Une hostie était tombée par terre au moment de la communion. Comme cela est recommandé, elle fut mise dans de l’eau, afin qu’elle se dissolve. Mais au lieu de se dissoudre, des taches rouges apparurent. Mgr Stefan Cichy, alors évêque de Legnica, nomma une commission pour étudier le phénomène. Un fragment de l’hostie fut prélevé et envoyé au laboratoire national de médecine légale. Ce laboratoire a conclu qu’il s’agissait d’un fragment de muscle strié « très similaire au myocarde (muscle du cœur) avec des altérations qui apparaissent souvent pendant l’agonie ». L’analyse ADN a conclu qu’il s’agissait de myocarde humain. En janvier dernier, le nouvel évêque, Mgr Kiernikowski, a envoyé ces conclusions à la Congrégation pour la doctrine de la foi, à Rome. Quelques semaines plus tard, celle-ci a reconnu le miracle. Si bien que, conformément aux recommandations reçues de Rome, Mgr Kiernikowski a demandé au curé de la paroisse Saint-Hyacinthe, le Père Ziombrze, « d’aménager un endroit approprié pour que les fidèles puissent vénérer la Relique ». « J’espère que ceci servira à approfondir le culte de l’Eucharistie et aura un effet en profondeur sur la vie des gens qui se trouveront en face de la Relique », peut-on lire dans le communiqué de Mgr Kiernikowski daté du 10 avril. « Nous voyons ce Signe mystérieux comme un acte extraordinaire d’amour et de bonté de Dieu, qui vient vers les hommes dans une suprême humiliation. » Le fait que le miracle ait eu lieu dans cette église néogothique n’est pas anodin non plus. Construite en 1904-1905 et inaugurée en 1908, du temps où la Silésie était prussienne, cette église était une commande de l’empereur Guillaume II et avait pour nom « église du souvenir de l’empereur Frédéric III ». C’était donc un lieu de culte protestant. En 1945, elle fut utilisée comme écurie par l’Armée rouge. Elle fut restaurée par la suite, mais était restée sans affectation particulière jusqu’en 1972, lorsqu’elle fut érigée en nouvelle paroisse Saint-Hyacinthe. Depuis 2002, c’est un sanctuaire diocésain consacré à saint Hyacinthe, le premier dominicain polonais. C’est sans doute l’unique cas en Pologne, depuis ces cinquante dernières années, d’un ancien temple protestant transformé en église catholique. Nous pouvons dire que Notre Seigneur a voulu aussi affirmer la vérité de sa présence réelle dans la Sainte Hostie face aux erreurs des hérétiques protestants.
Affirmons donc sans aucun doute que Notre Seigneur se trouve réellement, vraiment, substantiellement présent dans le Très Saint Sacrement. Malgré la clarté des enseignements de l’Eglise des opinions hérétiques continuent à avoir lieu de nos jours. Il y a quelque temps j’ai reçu une lettre où on pouvait lire : «Quant aux commentaires sur le respect de l’hostie, je partage avec vous le souhait que la nourriture ne soit pas gaspillée. Selon ma foi il ne m’apparait cependant pas correct de considérer que la chose appelée hostie est tout entière « la présence réelle ». Ma foi (…) est plutôt que la présence réelle se manifeste bien davantage dans la mise en œuvre du partage eucharistique de l’ensemble des membres de la communauté qui forment le corps du Christ que dans la chose elle-même. Ce n’est peut-être qu’une divergence d’appréciation ». A cette opinion on peut opposer les paroles de saint Thomas d’Aquin : «Certains, négligeant toutes ces considérations, ont professé que le corps et le sang du Christ ne se trouvent dans ce sacrement que comme le signifié se trouve dans le signe. Cette position est à rejeter comme hérétique, car elle contredit les paroles du Christ».
Nous ne saurions donc trop admirer la perfection, la gloire et la grandeur de la sainte Eucharistie, puisqu’il n’y a, pour ainsi dire, qu’un seul degré qui nous sépare de la béatitude céleste. Nous avons cela de commun avec les habitants des cieux, que les uns et les autres nous possédons Jésus-Christ ; Dieu et homme, présent au milieu de nous. Le seul degré qui nous sépare d’eux, c’est qu’ils jouissent de la Présence de Jésus-Christ par la vision béatifique, tandis que nous, nous adorons seulement sa Présence, Présence invisible à nos yeux, et cachée sous le voile miraculeux des saints mystères, mais que cependant nous confessons avec une Foi ferme et inébranlable.
Jésus-Christ nous a laissé dans ce Sacrement, la preuve de l’immense amour qu’Il a pour nous. «C’est par amour qu’il a pris, pour notre salut, un vrai corps de même nature que le nôtre. Et parce que la propriété essentielle de l’amitié, selon Aristote, est » qu’on partage la vie de ses amis », il nous a promis pour récompense sa présence corporelle : « Là où sera le corps, dit-il (Mt 24, 28), là se rassembleront les aigles. » En attendant toutefois, il ne nous a pas privés de sa présence corporelle pour le temps de notre pèlerinage, mais, par la vérité de son corps et de son sang, il nous unit à lui dans ce sacrement. Ce qui lui fait dire (Jn 6, 57) : « Qui mange ma chair et boit mon sang, demeure en moi, et moi en lui. » Ce sacrement est ainsi le signe de la suprême charité et le réconfort de notre espérance, puisqu’il opère une si intime union entre le Christ et nous» (Saint Thomas d’Aquin: Somme de Théologie, III, 75, 1).