Le témoignage.
« Celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père qui est aux cieux». Cette affirmation devrait faire trembler nos consciences et secouer nos conforts spirituels.
Dans la première lecture, le prophète Jérémie nous ouvre les mystères de son âme: servir la Parole l’a conduit à bien des persécutions, il aimerait se retirer et avoir une vie « normale », libérée de tous les soucis qui l’accablent. Et pourtant, il accomplit jour après jour sa vocation de «prophète qui dérange», car l’Esprit l’anime et ne le laisse pas en paix. Il se confie ainsi: « La parole du Seigneur a été pour moi source d’opprobre et de moquerie tout le jour. Je me disais: Je ne penserai plus à lui, je ne parlerai plus en son Nom ; mais c’était en mon cœur comme un feu dévorant, enfermé dans mes os. Je m’épuisais à le contenir, mais je n’ai pas pu… » (Jr 20,8-9).
Son exemple nous inspire aujourd’hui, et les paroles du Christ dans l’Evangile viennent illuminer notre chemin de « Jérémie modernes ». Dans ce discours missionnaire (Mt 10), Jésus, tout à la fois nous met en garde contre l’apostasie, nous assure de son soutien dans l’épreuve et nous livre la clé du témoignage chrétien.
L’apostasie : est-ce un terme dépassé ou bien encore une réalité ?
Ecoutons le Pape Jean Paul II qui avait dressé un tableau alarmant de la situation en Europe: « La culture européenne donne l’impression d’une « apostasie silencieuse » de la part de l’homme comblé qui vit comme si Dieu n’existait pas ». Le prophète Jérémie exprimait sa fidélité envers le Seigneur par cette expression: «parler en son Nom ». Jésus exigeait de ses disciples la même attitude par ses paroles: «se déclarer pour lui devant les hommes ». Les apôtres réaliseront ce témoignage après la Pentecôte devant les autorités de Jérusalem, en subissant la persécution (Ac 5,40-41).
Nous admirons souvent les martyrs du temps passé et de notre époque mais nous oublions facilement que rendre témoignage au Christ est le devoir et la mission de tout chrétien au quotidien. Nous trouvons facilement d’innombrables excuses pour échapper aux conséquences désagréables d’un témoignage dérangeant, souvent rejeté. Le fidèle doit témoigner du nom du Seigneur, en confessant sa foi sans céder à la peur (cf. Mt 10, 32 ; 1 Tm 6, 12). Sommes-nous fidèles à l’invitation du Christ à « proclamer sur les toits ce que vous entendez au creux de l’oreille»(v.27)? Pouvons-nous dire que nos prédications, nos catéchèses, nos conversations, sont vraiment un témoignage fort du Mystère du Christ, ou bien cèdent-elles à l’esprit du monde pour flatter les oreilles de nos auditeurs ? Qu’en est-il de notre témoignage? Osons-nous dire très simplement que nous allons à la messe ou évoquons-nous un « rendez-vous »? Présentons-nous de simples condoléances aux personnes en deuil ou savons-nous les assurer de notre prière? Lorsque nous sommes mêlés à des conversations sur la Foi, la présence de Dieu dans ce monde ou la dignité de l’être humain, sommes-nous de vrais témoins ou préférons-nous nous ranger à l’opinion générale?
L’enjeu est de taille, et c’est pourquoi les paroles du Christ sont si fortes: « Celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père qui est aux cieux. » (v.33) Cette affirmation devrait faire trembler nos consciences et secouer nos conforts spirituels.
Enfin, Jésus va plus loin: Il ne nous dit pas seulement combien il est grave de le renier Il ne se contente pas de nous pardonner avec patience lorsque nous sommes tombés; Il nous donne surtout, dans le même discours, un peu avant le passage de ce jour, la clé de tout véritable témoignage: « Mais, lorsqu’on vous livrera, ne cherchez pas avec inquiétude comment parler ou que dire: ce que vous aurez à dire vous sera donné sur le moment, car ce n’est pas vous qui parlerez, mais l’Esprit de votre Père qui parlera en vous. » (Mt 10,19-20).
C’est cet Esprit qui nous inspire à chaque instant le témoignage qui convient, parce qu’Il connaît la situation de chacun et la Parole qu’il peut recevoir ou donner. Supplier ardemment de recevoir cette inspiration, nous y abandonner et ne pas oublier de l’en remercier: voici ce qui devrait donner à notre vie chrétienne une fécondité surprenante.
Dans notre méditation, nous pouvons reprendre cette belle prière de Mère Teresa, dans la ligne de l’Evangile de ce dimanche. Elle met sur les lèvres du Christ des paroles d’amour envers nos âmes:
Je connais tout de toi. Même les cheveux de ta tête, je les ai tous comptés. Rien de ta vie est sans importance à mes yeux. Je connais chacun de tes problèmes, de tes besoins, de tes soucis. Oui, je connais tous tes péchés, mais je te le redis une fois encore : Je t’aime, non pas pour ce que tu as fait, non pas pour ce que tu n’as pas fait. Je t’aime pour toi même, pour la beauté et la dignité que mon Père t’a données en te créant à son image et à sa ressemblance.