Les disciples d’Emmaüs.
Aimons donc l’hospitalité; aimons pratiquer la charité. Nous sommes si paresseux devant la grâce de l’hospitalité! Mesurons la grandeur de cette vertu. Recevons le Christ à notre table, afin de pouvoir être reçus à son festin éternel.
Les deux disciples dont parle l’Evangile de ce jour sont dans la tristesse, le désespoir et s’éloignent de la communauté. Ils quittent Jérusalem et se dirigent vers Emmaüs, un petit village sans importance. Ils discutent entre eux de tout ce qui est advenu et sont dans une grande tristesse car cela ne correspond pas à ce qu’ils attendaient. Ils disent : « Nous espérions ». Cet «espérions», au passé est une confession de désespoir, ils pourraient tout aussi bien dire : « Maintenant nous n’espérons plus ».
Jésus s’approche d’eux et opère leur conversion en passant par diverses étapes. Il commence par écouter ces disciples abattus. Il les fait parler, il leur demande : « De quoi discutez-vous en marchant ? ». Ceux-ci, étonnés, lui répondent : « Tu es bien le seul étranger résidant à Jérusalem qui ignore les événements de ces jours-ci ».
Ces événements ont été terribles pour les disciples de Jésus. Ils rapportent par la suite que « Jésus de Nazareth : cet homme était un prophète puissant par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple. Les chefs des prêtres et nos dirigeants l’ont livré, ils l’ont fait condamner à mort et ils l’ont crucifié », et concluent : « Et nous qui espérions qu’il serait le libérateur d’Israël ! ».
Les disciples rapportent aussi la nouvelle, propagée par des femmes, de ce que le sépulcre est vide. Cependant ce témoignage des femmes ne semble pas être digne d’attention et encore moins de foi pour ces disciples. Rien de positif, aucun fait ne confirme cela. Le sépulcre est peut-être vide, mais cela ne signifie pas nécessairement que Jésus soit vivant.
Ensuite Jésus reprend les disciples avec sévérité, mais une sévérité empreinte de douceur. Jésus leur dit : « Vous n’avez donc pas compris ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce qu’ont dit les prophètes ! ». Ce qui vient de se passé a été annoncé dans les prophéties. Et les prophéties elles-mêmes sont éclairées par l’accomplissement de la mort et résurrection de Jésus.
Aussi dit-il aux deux disciples : « Ne fallait-il pas que le Messie souffrît tout cela pour entrer dans sa gloire ? ». Alors, commençant par Moïse et passant par toutes les prophéties, il leur explique ce qui, dans les Ecritures, annonce sa mission.
La Passion de Jésus était un passage nécessaire vers la gloire. Pour Jésus, comme pour tout chrétien, le chemin vers la gloire passait nécessairement par la souffrance. Cette réalité n’est pas facile à accepter, même si elle est fondamentale.
Pourquoi la Passion était-elle nécessaire? Parce que la gloire du Christ est la gloire du Rédempteur. La gloire de nous avoir rachetés par son sang ! Elle est la gloire du vainqueur du péché et de la mort. Il était nécessaire que le Christ se soumette à la souffrance humaine jusqu’à son extrême pour répandre son amour sur toute la création et tout transformer en une occasion de victoire sur le péché et sur la mort.
Dans la seconde lecture, saint Pierre rappelle aux fidèles qu’ils ont été rachetés, libérés, non pas au prix de « l’or et de l’argent car ils seront détruits » mais bien par « le sang précieux du Christ, l’Agneau sans défaut et sans tache ». Pour le Christ, la Passion est le chemin pour entrer dans la gloire, qui est aussi la gloire d’avoir aimé jusqu’au bout (cf. Jn 13,1). Nous ne sommes véritablement chrétiens que si nous accueillons cet enseignement de Jésus : « Il fallait que le Messie souffrît tout cela pour entrer dans sa gloire ». Il faut que nous, chrétiens, nous passions par la croix pour entrer dans la gloire.
N’ayant pas encore reconnu le Seigneur, malgré les explications, les deux disciples invitent et forcent même cet étranger « à partager leur gîte, comme on le fait avec un voyageur ». Et saint Grégoire commente : « Ils apprêtent donc la table, ils présentent la nourriture, et Dieu, qu’ils n’avaient pas reconnu dans l’explication de l’Ecriture, ils le découvrent dans la fraction du pain. Ce n’est donc pas en écoutant les préceptes de Dieu qu’ils ont été illuminés, mais en les accomplissant : « Ce ne sont pas ceux qui écoutent la Loi qui seront justes devant Dieu, mais ceux qui mettent la Loi en pratique qui seront justifiés » (Rm 2,13). Si quelqu’un veut comprendre ce qu’il a entendu, qu’il se hâte de mettre en pratique ce qu’il en a déjà pu saisir. Le Seigneur n’a pas été reconnu pendant qu’il parlait ; il a daigné se manifester lorsqu’on lui a offert à manger ».
Aimons donc l’hospitalité; aimons pratiquer la charité. Paul affirme à ce sujet : « Persévérez dans la charité fraternelle. N’oubliez pas l’hospitalité, car c’est grâce à elle que quelques-uns, à leur insu, ont reçu chez eux des anges » (He 13,1 ;Gn 18,1s). Pierre dit aussi : « Pratiquez l’hospitalité les uns envers les autres, sans murmurer » (1P 4,9). Et la Vérité elle-même nous déclare : «J’étais un étranger, et vous m’avez recueilli » (…) « Ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, nous dira le Seigneur au jour du jugement, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25,35.40). Et malgré cela, nous sommes si paresseux devant la grâce de l’hospitalité ! Mesurons la grandeur de cette vertu. Recevons le Christ à notre table, afin de pouvoir être reçus à son festin éternel. Donnons maintenant l’hospitalité au Christ présent dans l’étranger, afin qu’au jugement nous ne soyons pas comme des étrangers qu’il ne connaît pas (Lc 13,25), mais nous reçoive comme des frères dans son Royaume .
Notre bon Jésus ressuscité réconforte, redonne la joie et l’espérance, et réchauffe la charité de ses disciples. Qu’il veuille aussi le faire avec nous afin que nous devenions ses témoins.