Les tentations.
Qui cherche les délices, qui veut être bien sur la terre, prépare au tentateur une victoire facile.
Qui fuit les délices, qui embrasse la pauvreté, les privations, acquiert contre Satan une force insurmontable.
L’Evangile de ce 1er dimanche de carême nous présente « la tentation au désert ». Notre-Seigneur, après son baptême, où il a été proclamé par Dieu comme son Fils bien-aimé, fut conduit par le Saint-Esprit dans le désert, pour y être tenté par le diable. Autrement dit, pour combattre le diable et le vaincre.
« Milice est la vie de l’homme sur la terre » nous dit l’Esprit Saint dans le livre de Job ; et ce mercredi-là après avoir reçu les cendres sur nos têtes nous avons prié : « Accorde-nous, Seigneur, de commencer par une sainte pénitence notre entraînement au combat spirituel ; et tandis que nous lutterons contre les esprits mauvais, que nos privations nous soient comme un rempart ». L’apôtre saint Matthias disait dans sa prédication: «Affaiblissez le corps par la mortification afin que l’esprit soit soumis au Crucifié».
Aujourd’hui nous méditons donc le combat du Christ, qui est notre modèle et notre défenseur. Tout aussitôt après son baptême, Notre-Seigneur, plein de l’esprit de prière, de gémissement et de pénitence, alla au désert comme une colombe innocente, commencer son jeûne et pleurer nos péchés dans la solitude. Qu’est-ce que le baptême, en effet, sinon une mort à ce monde visible, une complète séparation qui s’opère par des renoncements formels à Satan, à ses œuvres et à ses pompes.
Un chrétien, étant l’enfant de Dieu, est du ciel plus que de la terre. La terre est pour lui un désert, une solitude, tant qu’il n’est pas uni à son Dieu. En attendant cette union, il faut être tenté par le diable.
Au tout début de l’histoire humaine, le diable a tenté Eve et l’a fait tomber; par Eve, il a fait tomber Adam et nous a fait tomber tous. Il a tenté Notre-Seigneur: comment se pourrait-il qu’il ne nous tente pas? Mais Notre-Seigneur l’a vaincu: par Notre-Seigneur nous sommes et serons victorieux du tentateur. Donc, attachons-nous étroitement et inséparablement à Notre-Seigneur.
Notre-Seigneur est au désert; Adam était au paradis terrestre. Adam ne manquait de rien et fut vaincu; Notre Seigneur manquait de tout et fut vainqueur. Satan pénétra au paradis et y fit entrer le péché; il pénétra au désert où était Notre-Seigneur et y subit une triple défaite.
Qui cherche les délices, qui veut être bien sur la terre, prépare au tentateur une victoire facile.
Qui fuit les délices, qui embrasse la pauvreté, les privations, acquiert contre Satan une force insurmontable.
Qu’il fait bon considérer, de contempler Jésus dans son désert! Il n’a d’autre abri que le ciel, d’autre lit que la terre, d’autre nourriture que le jeûne, d’autre occupation que la prière et l’entretien avec son Père qui est dans les cieux.
Quelles journées, quelles nuits, quel silence, quelles privations, quelle pénitence! Seigneur Jésus, attirez-nous avec vous dans le désert; il nous sera plus doux qu’un paradis de délices, pourvu que nous y soyons avec vous. Donnez-nous l’esprit de retraite, de silence, de recueillement et gardez-nous avec vous toujours. Seigneur Jésus, n’est-ce pas ici-bas le bien le plus souhaitable d’être là avec vous? Laissons-nous entraîner aujourd’hui donc par ces paroles de notre Seigneur : « Venez à mon école, car je suis doux et humble de cœur ».
Le saint Curé d’Ars enseignait au sujet de la tentation : « Nous lisons dans l’histoire qu’un saint prêtre rencontra un jour un chrétien, qui était dans une peur continuelle de succomber à la tentation. Pourquoi craignez-vous ? lui dit le prêtre. Hélas! Mon père, lui dit-il, je crains d’être tenté, de succomber et de périr. Ah s’écrie-t-il en pleurant, n’ai-je pas lieu de trembler, si tant de millions d’anges ont succombé dans le ciel, si Adam et Eve ont été vaincus dans le paradis terrestre.
Mais, mon ami, lui dit le saint prêtre, ne savez-vous pas que le démon est comme un gros chien attaché, il aboie et fait grand bruit; mais il ne mord que celui qui s’approche de trop près. Ayez confiance en Dieu, fuyez les occasions du péché et vous ne succomberez pas. Si Eve n’avait pas écouté le démon, si elle avait pris la fuite dès qu’il lui parla de transgresser les commandements de Dieu, elle n’aurait pas succombé. Lorsque vous serez tenté, rejetez de suite les tentations et, si vous pouvez, faites dévotement le signe de la croix, pensez aux tourments qu’endurent les réprouvés pour n’avoir pas su résister à la tentation; levez les yeux vers le ciel et vous verrez la récompense de celui qui combat; appelez votre bon ange à votre secours, jetez-vous promptement entre les bras de la Mère de Dieu, en réclamant sa protection; vous êtes sûr d’être victorieux de vos ennemis et vous les verrez bientôt couvert de confusion.
Si vous succombez, mes frères, cela ne vient donc que de ce que nous ne voulons pas prendre les moyens que le bon Dieu nous offre pour combattre. Il faut surtout être bien convaincus que, de nous-mêmes, nous ne pouvons que nous perdre; mais qu’avec une grande confiance en Dieu, nous pouvons tout ».
Combattons donc le bon combat, fixés les yeux sur notre Sauveur.