Fête de Notre Dame du Rosaire.
Vénérons donc toujours la très sainte Mère de Dieu, au moyen de cette dévotion qui lui est très agréable ; et celle qui, tant de fois invoquée par les fidèles du Christ confiants dans les supplications du Rosaire, nous a obtenu d’abaisser et d’anéantir nos ennemis terrestres, nous accordera pareillement de triompher de ceux de l’enfer.
En 1571, le pape saint Pie V institua une fête annuelle, intitulée « Sainte-Marie de la Victoire », en action de grâce de la victoire remportée à Lépante. Par la suite, Grégoire XIII changea ce titre en celui de « Notre-Dame du Rosaire », et Clément XI étendit cet office à toute l’Eglise.
Le Rosaire a été établi par saint Dominique de Guzman et l’Ordre des Frères Prêcheurs perpétue cette dévotion, notamment au travers des confréries du saint Rosaire, dont les membres peuvent obtenir des indulgences spéciales par l’assistance à des cérémonies et la dévotion du Rosaire.
Rappelons que le Rosaire consiste dans les prières les plus saintes et les plus augustes qui puissent jamais sortir de la bouche d’un chrétien, à savoir : le Symbole de la foi, composé par les apôtres au temps de leur séparation, par les lumières et le mouvement du Saint-Esprit. Puis l’oraison dominicale, enseignée par Jésus-Christ même à ses disciples lorsqu’ils lui demandèrent de quelle manière ils devaient prier et la salutation angélique, qui est le salut que l’ange Gabriel apporta du ciel à la glorieuse Vierge pour lui déclarer qu’elle allait être la Mère de Dieu. A cela s’ajoute les bénédictions que sainte Élisabeth, sa cousine, lui donna, lorsqu’elle reçut sa visite, et une supplique que l’Eglise y ajoute, pour implorer son intercession auprès de Dieu, tant durant notre vie qu’à l’heure de notre mort.
Il faut aussi remarquer que, pour dire parfaitement le Rosaire, ce n’est pas assez de réciter avec dévotion les quinze (ou vingt dizaines) qui le composent, mais il est nécessaire de s’appliquer à la méditation, ou au moins au souvenir et à la vénération des Mystères en l’honneur desquels on les récite.
Il faudrait de gros volumes pour rapporter les merveilles qui se sont faites par la récitation du Rosaire. Des pécheurs endurcis, et dont le salut était presque désespéré ont été convertis, des hérétiques opiniâtres et malicieux ont été éclairés. Des villes, des provinces et des royaumes entiers ont été heureusement changés, soit par la réforme des mœurs, soit par l’abjuration des erreurs où ils se trouvaient engagés. Des morts ont recouvré la vie, des aveugles la vue, des sourds l’ouïe, des muets la parole, des boiteux et des paralytiques l’usage de leurs membres, et toutes sortes de malades, une santé qu’ils ne pouvaient attendre des remèdes ordinaires de la médecine. Des tempêtes ont été apaisées, des embrasements éteints, des séditions étouffées dans leurs plus grandes fureurs, des batailles importantes gagnées, et la paix rétablie en des temps où l’on n’osait plus l’espérer.
Par le moyen du Rosaire, tantôt on a obtenu de la pluie pour faire fructifier les semences de la terre, tantôt on a arrêté les trop grandes inondations qui menaçaient les campagnes d’une désolation universelle. Des femmes se sont servies utilement de cette dévotion soit pour avoir des enfants, soit pour changer l’humeur farouche et impraticable de leur mari, soit pour attirer sur leur famille les bénédictions célestes, sans lesquelles elles étaient entièrement ruinées. Ceux qui y ont eu recours, ou dans leurs procès, ou dans les poursuites rigoureuses et impitoyables de leurs créanciers, ou dans les misères d’une longue captivité, en ont reçu des assistances prodigieuses et toutes surnaturelles.
Plusieurs âmes ont été tirées des flammes du purgatoire et quelques-unes même, en revenant dans leurs corps, ont évité celles de l’enfer par son efficacité et sa vertu. On ne peut compter les fruits de sainteté qu’elle a produits.
C’est ce qui a porté les souverains pontifes à accorder de grandes indulgences, ou plénières, ou limitées à ceux qui réciteraient pieusement le Rosaire.
Fête étendue à tout le rite romain en 1716, célébrée le 1er dimanche d’octobre jusqu’à la réforme de Pie X, fixée au 7 octobre en 1914. Mais le 1er dimanche d’octobre reste encore, dans le code des Rubriques de 1960, jour propre de la solennité externe de la fête.
La réforme de Jean XXIII en a changé l’intitulé : au lieu de la fête du Très Saint Rosaire, il est désormais fête de Notre-Dame du Rosaire.
La fête se rattache initialement à la Confrérie du Rosaire, d’inspiration dominicaine, qui se proposait de diffuser la dévotion au chapelet. En 1571, le pape saint Pie V institua une fête de Notre-Dame de la Victoire, en action de grâce pour la victoire de Lépante remportée par don Juan d’Autriche sur les Turcs, victoire attribuée à la récitation du chapelet. Grégoire XIII lui donna le titre qu’elle porte aujourd’hui et la fixa au premier dimanche d’octobre. Obligatoire pour les seules églises où se trouvait érigée la confrérie du Rosaire, elle fut étendue à toute l’Espagne par Clément X. Sous Clément XI, elle devint universelle (1716), en mémoire de deux nouvelles victoires remportées sur les Turcs.
Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à découvrir la place de Marie dans le mystère du Salut en redisant sans cesse : « Je vous salue Marie, pleine de grâce… ». Marie a accepté d’être la mère de Dieu, lors de l’Annonciation, participant ainsi au mystère de la Rédemption. L’Ave Maria est constitué d’une salutation rappelant la visitation de l’Ange lors de l’Annonciation et d’une invocation pour confier à la Mère de Dieu la vie de ses fils aujourd’hui et à l’heure où ils rejoindront Dieu.
Quand l’hérésie albigeoise s’étendait avec impiété dans la province de Toulouse, et y poussait des racines de jour en jour plus profondes, saint Dominique, qui avait fondé récemment l’Ordre des Frères Prêcheurs, s’appliqua tout entier à la faire disparaître. Pour y arriver plus sûrement, il implora par des prières assidues le secours de la bienheureuse Vierge, dont les hérétiques attaquaient impudemment la dignité, et à laquelle il a été donné de détruire les hérésies dans l’univers entier.
Dominique (à ce que rapporte la tradition), reçut de Marie l’avertissement de prêcher le Rosaire au peuple, comme un secours singulièrement efficace contre les hérésies et les vices; et il est prodigieux de voir avec quelle ferveur, et aussi quel succès, il s’acquitta de la tâche qui lui avait été imposée.
Or le Rosaire est une formule particulière de prière, dans laquelle on distingue quinze dizaines de salutations angéliques, dizaines séparées l’une de l’autre par l’oraison dominicale, et à chacune desquelles nous passons en revue et méditons pieusement les mystères de notre rédemption.
C’est donc à partir de ce moment que, grâce à saint Dominique, cette manière de prier commença à se faire connaître et à se répandre ; et, qu’il en soit l’instituteur et l’auteur, on le trouve affirmé dans les lettres apostoliques de souverains Pontifes.
De cette institution si salutaire, découlèrent sur le peuple chrétien d’innombrables bienfaits, parmi lesquels on cite avec raison la victoire que le très saint Pontife Pie V et les princes chrétiens, enflammés par ses paroles, remportèrent près des îles Echinades sur le puissant despote des Turcs.
En effet, comme au jour même où fut remportée cette victoire, les confréries du très saint Rosaire adressaient à Marie, dans tout l’univers, les supplications accoutumées et les prières prescrites selon l’usage, le triomphe obtenu a été attribué, non sans raison, à ces prières.
Grégoire XIII en a lui-même rendu témoignage, et, pour qu’en souvenir d’un bienfait si marqué, d’éternelles actions de grâces fussent rendues à la bienheureuse Vierge, invoquée par les fidèles sous l’appellation de Notre Dame du Rosaire, il a concédé un Office du rite double majeur, à célébrer à perpétuité, dans toutes les églises où il y avait un autel du Rosaire.
D’autres Pontifes ont accordé des indulgences presque innombrables à ceux qui réciteraient le Rosaire, comme aux confréries de ce même Rosaire.
Clément XI attribuait en son cœur à l’efficacité des mêmes prières, la victoire également insigne remportée l’an mil sept cent seize dans le royaume de Hongrie, sur les troupes innombrables des Turcs, par Charles VI, empereur des Romains, car cette victoire arriva le jour où l’on célébrait la fête de la dédicace de sainte Marie aux Neiges, et environ à l’heure où les confrères du très saint Rosaire, ayant organisé dans la Ville sainte une supplication publique et solennelle, avec un immense concours de peuple et une grande marque de religion, versaient aux pieds du Seigneur de ferventes prières pour la défaite des Turcs, et imploraient humblement le puissant secours de la Vierge Mère de Dieu, en faveur des chrétiens.
En raison de ces circonstances, Clément XI jugea donc devoir pieusement attribuer à la protection de la bienheureuse Vierge cette victoire, ainsi que la délivrance de l’île de Corcyre, assiégée par les Mahométans, qui la suivit de près. Pour que ce nouveau bienfait, si insigne aussi, laissât un souvenir et une reconnaissance perpétuels, il étendit à l’Église universelle, sous le même rite, la Fête du très saint Rosaire. Benoît XIII ordonna d’insérer toutes ces faveurs dans le bréviaire romain.
Enfin Léon XIII, dans nos temps si troublés pour l’Eglise et en présence de l’affreux déchaînement des maux qui nous accablent depuis si longtemps, a souvent et vivement excité par des lettres apostoliques, réitérées, tous les fidèles du monde à la dévotion du Rosaire de Marie, les engageant à le réciter, surtout pendant le mois d’octobre. Il a, de plus, élevé cette fête à un grade supérieur, et ajouté aux Litanies de Lorette l’invocation de « Reine du très saint Rosaire, » et enfin concédé à l’Eglise universelle un office propre pour la même solennité.
Vénérons donc toujours la très sainte Mère de Dieu, au moyen de cette dévotion qui lui est très agréable ; et celle qui, tant de fois invoquée par les fidèles du Christ confiants dans les supplications du Rosaire, nous a obtenu d’abaisser et d’anéantir nos ennemis terrestres, nous accordera pareillement de triompher de ceux de l’enfer.
Homélie de saint Bernard, Abbé.
« Voulant faire apprécier sa grâce et confondre la sagesse humaine, Dieu daigna prendre chair d’une femme, mais d’une vierge, afin de restituer la ressemblance par un semblable, de guérir le contraire par un contraire, d’arracher l’épine vénéneuse et d’effacer, avec une souveraine puissance, la cédule du péché. Eve a été l’épine, en blessant, et Marie, la rose, en gagnant l’affection de tous. Eve a été l’épine inoculant la mort à tous et Marie la rose qui nous a tous guéris. Marie fut une rose blanche par la virginité et rouge par la charité ; blanche par la chasteté de son corps, rouge par la ferveur de son esprit ; blanche en recherchant la vertu, rouge en foulant aux pieds les vices ; blanche par la pureté des affections, rouge par la mortification de la chair ; blanche en aimant Dieu, rouge en compatissant au prochain.
« Le Verbe s’est fait chair » et déjà il habite en nous. Il habite dans notre mémoire, il habite dans notre pensée, car il descend jusque dans notre imagination elle-même. Comment cela, dites-vous ? En gisant sur la paille de la crèche, en reposant sur un sein virginal, en prêchant sur la montagne, en passant la nuit en prières, en se laissant suspendre à la croix et défigurer par le trépas, en se montrant « libre entre les morts» et en commandant à l’enfer ; en ressuscitant le troisième jour, en montrant à ses apôtres, dans les traces des clous, les signes de sa victoire, enfin en s’élevant devant eux au plus haut du ciel.
Est-ce que chacun de ces faits n’inspire pas des pensées vraies, pieuses, saintes ? Quand je les repasse dans mon esprit, c’est à Dieu que je pense, et dans ces mystères, je trouve mon Dieu. Méditer ces choses, dit saint Bernard, c’est sagesse, et, à mon jugement, c’est prudence que d’en ramener le souvenir, souvenir dont la douceur est comme l’amande du fruit produit en abondance par la verge d’Aaron, et que Marie est allée cueillir dans les hauteurs des cieux, pour le répandre sur nous à profusion. Oui, c’est bien au plus haut des cieux qu’elle est allée le prendre, et par-delà les Anges, quand elle a reçu le Verbe du sein de Dieu même, pour nous enrichir. C’est dans les hauteurs et plus haut que les Anges, que Marie a reçu le Verbe, du sein même du Père ».