Dieu ne croit pas s’abaisser en venant vers nous et en se donnant Lui-même à nous, dans sa chair et dans son Sang. Dieu ne s’abaisse pas. Il reste Dieu.
Nous devons Le remercier, lui rendre grâce d’avoir cette charité immense, cet amour infini, cet amour divin, de demeurer près de nous.
S’il est une fête qui doit être chère à nos cœurs catholiques, c’est bien la fête du très Saint-Sacrement.
Qu’y a-t-il de plus grand, de plus beau, de divin dans notre sainte religion que le Saint-Sacrement de l’Eucharistie ? Que pouvait faire Notre Seigneur Jésus-Christ pour manifester sa charité et son amour envers nous de plus efficace, de plus évident, que de nous laisser sous les espèces du pain et du vin, son Corps, son Sang, son Ame et sa Divinité ?
Nous affirmons aujourd’hui de manière solennelle notre foi dans la Sainte Eucharistie. Cette foi qui est mise en doute aujourd’hui ; cette foi qui est mise en doute par l’attitude, par le manque de respect que l’on a vis-à-vis de la très Sainte Eucharistie, de Notre Seigneur Jésus-Christ Lui-même présent sous les espèces du pain et du vin. Nous devons donc, nous, affirmer davantage encore, plus que jamais, notre foi dans la très Sainte Eucharistie. C’est pourquoi nous sommes heureux de nous réunir aujourd’hui, autour de Jésus dans l’Eucharistie et de lui manifester notre foi en sa divinité, notre adoration.
C’est pour cela que depuis des siècles et des siècles déjà, dans l’Eglise, cette coutume s’est établie, cette tradition, d’adorer Notre Seigneur Jésus-Christ dans la Sainte Eucharistie, publiquement, dans les villages, dans les villes, dans les petites cités comme dans les grandes, dans les maisons religieuses, dans les monastères. Partout on a honoré l’Eucharistie, partout en ce jour de la fête du très Saint Sacrement, ou du Corpus Christi, on honore d’une manière publique la très Sainte Eucharistie.
C’est déjà le concile de Trente qui disait : « Il faut honorer Notre Seigneur Jésus-Christ publiquement, afin que ceux qui voient et qui constatent la foi des catholiques en la très Sainte Eucharistie soient eux aussi attirés par cet hommage qui est rendu à Notre Seigneur Jésus-Christ présent dans ce grand sacrement. »Voilà ce que disait le concile de Trente qui encourageait cette coutume et cette tradition déjà très ancienne d’honorer Notre Seigneur Jésus-Christ publiquement, dans les rues de nos cités, dans nos campagnes, comme nous le faisons aujourd’hui.
C’est pourquoi nous ferons tout à l’heure cette procession, avec toute notre foi, redisant à Notre Seigneur Jésus-Christ : Oui, nous croyons Jésus que vous êtes présent dans ce Saint Sacrement. Nous le croyons aujourd’hui doublement, triplement, quadruplement, pour tous ceux qui n’y croient plus, pour tous ceux qui vous méprisent dans votre sacrement. Pour tous ceux qui commettent des sacrilèges. Nous faisons aujourd’hui nôtre la prière de l’Ange de Portugal: «Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime. Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas et ne vous aiment pas». Nous ferons cet acte de foi, en demandant à Notre Seigneur Jésus-Christ d’augmenter notre foi.
Demandons pour cela aujourd’hui l’intercession des martyrs de l’Eucharistie. A Rome, sur la via Apia, Tarsicius, un enfant de chœur, est martyrisé. Des jeunes païens le trouvèrent alors qu’il portait le Corps du Christ aux chrétiens emprisonnés et lui demandèrent ce qu’il portait. Tarcisius décide alors d’accomplir ce que Jésus avait dit : « Ne jetez pas les perles aux cochons», et il refusa de répondre. Les païens le lapidèrent et lui donnèrent des coups jusqu’à ce qu’il rende son esprit, mais ils ne purent pas s’emparer du Corps du Christ. Au IIIe siècle, Tarsicius, martyr de Jésus Eucharistie. Dix-sept siècles plus tard, une petite fille chinoise a aussi donnée sa vie pour Jésus. Le récit de son martyre nous est parvenu par l’archevêque Fulton J. Sheen (1895-1979), qui a déclaré que cette fille avait été sa plus grande inspiration pour son sacerdoce. Lorsque les communistes ont pris le contrôle de la Chine, ils ont emprisonné un prêtre dans son propre presbytère près de l’église. Le prêtre a regardé avec terreur de sa fenêtre les communistes entrer dans l’église et se diriger vers le sanctuaire. Pleins de haine, ils profanèrent le tabernacle, prirent le ciboire et le jetèrent à terre, dispersant les hosties consacrées. C’étaient des temps de persécution et le prêtre savait exactement combien d’hosties contenait le ciboire : trente-deux. Lorsque les communistes se sont retirés, ils n’ont apparemment pas remarqué la présence d’une petite fille qui priait au fond de l’église et qui avait vue tout ce qui s’était passé. Cette nuit-là, la petite fille revint et, échappant au garde posté dans le presbytère, entra dans l’église. Là, elle fit une heure sainte de prière pour réparer l’acte de haine. Puis elle s’agenouilla et, se penchant en avant, reçut Jésus en communion avec sa langue. La jeune fille a continué à revenir chaque nuit, faisant son heure sainte et recevant Jésus l’Eucharistie avec sa langue. La trente-deuxième nuit, après avoir consommé la dernière Hostie, elle fit accidentellement un bruit qui réveilla le garde qui couru après elle, l’a attrapée et l’a battue à mort avec la crosse de son fusil. Cet acte de martyre héroïque fut vu par le prêtre tandis que, extrêmement abattu, il regardait depuis la fenêtre de sa chambre convertie en cellule de prison. Lorsque l’évêque Fulton Sheen a entendu l’histoire, il a été tellement inspiré qu’il a promis à Dieu qu’il ferait une heure sainte de prière devant le Saint Sacrement tous les jours pour le reste de sa vie.
Dieu ne croit pas s’abaisser en venant vers nous et en se donnant Lui-même à nous, dans sa chair et dans son Sang. Dieu ne s’abaisse pas. Il reste Dieu. C’est nous qui devons manifester notre respect, notre adoration vis-à-vis de Dieu. Ce n’est pas parce que Dieu agit dans la simplicité et dans l’amour et dans la charité avec nous que nous devrions Le mépriser ; bien au contraire, nous devons Le remercier, lui rendre grâce d’avoir cette charité immense, cet amour infini, cet amour divin, de demeurer près de nous.
Que serions-nous sans Notre Seigneur Jésus-Christ, sans ce don extraordinaire que Dieu nous a fait ? Comme nous serions orphelins, comme nous nous sentirions seuls, un peu abandonnés par le Bon Dieu. Mais avec l’Eucharistie, lorsque nous avons besoin de Lui parler, de Le voir, de lui dire que nous L’aimons, lorsque nous avons besoin de secours spéciaux, nous pouvons nous rendre dans nos sanctuaires, nous agenouiller devant Notre Seigneur Jésus-Christ, peut-être seul, seul devant le Saint Sacrement et demander au Bon Dieu : Venez à mon aide. Secourez-moi ; je suis dans la difficulté, dans l’épreuve. Venez à l’aide de ma famille ; venez à l’aide de mes enfants. Et quand vous êtes reparti, que vous avez quitté l’église réconforté, cela vous l’avez été, j’en suis sûr, après chaque messe du dimanche. Que c’est beau la messe du dimanche, tous ces fidèles réunis autour de Notre Seigneur Jésus-Christ, participant à sa Passion, participant aussi à son Corps et à son Sang, repartant chez eux la paix dans l’âme, la joie dans le cœur, le réconfort dans leur âme et prêts à souffrir, s’il le faut, avec Notre Seigneur Jésus-Christ, à mieux supporter nos épreuves. Que de fois il nous est arrivé comme prêtre, d’assister les mourants ; que de fois il m’est arrivé de porter la communion à des malades ; quelle joie pour ces âmes qui souffraient, de recevoir leur Dieu de la main du prêtre qui venait leur porter la Sainte Communion. Quel réconfort : quelle source de courage pour eux ! Notre Seigneur Jésus-Christ a fait par ce sacrement, un miracle extraordinaire de son amour et par conséquent, nous aussi, nous devons Lui manifester notre amour.
Le sacrement de l’Eucharistie est vraiment le sacrement de la charité. Jésus ne pouvait pas faire davantage pour nous. S’il est le sacrement de notre foi d’abord, le Mysterium fidei, s’il est le mystère de notre foi – je dirai le test de notre foi – c’est à cela que l’on reconnaîtra les vrais catholiques, les véritables chrétiens, s’ils ont la foi profonde et réelle, efficace, en Notre Seigneur Jésus-Christ présent dans la Sainte Eucharistie. C’est là que l’on reconnaîtra la foi des chrétiens. Par conséquent, ce sacrement est vraiment le mystère de notre foi. Il est aussi le mystère de notre espérance. C’est Notre Seigneur Lui-même qui le dit : « Si vous mangez ma chair et buvez mon Sang, vous aurez la vie éternelle en vous ». Si vous mangez mon Corps et buvez mon Sang, vous aurez cette vie éternelle et un jour je vous ressusciterai. Notre Seigneur sera notre résurrection. Le Corps de Notre Seigneur Jésus-Christ présent dans nos pauvres corps est un gage de notre résurrection. C’est déjà la vie éternelle que nous possédons en nous. Cette vie éternelle ne nous quittera plus, même à l’heure de notre mort. Mystère de foi, mystère de notre espérance, mystère de la charité.
Je voudrais insister encore un peu sur cette efficacité de la charité produite par le sacrement de l’Eucharistie. Nous en avons besoin. Nous devons demeurer dans la charité. L’Eucharistie, le pain eucharistique est précisément cette image de l’union de tous les fidèles dans cette espèce de pain qui apparaît à nos yeux et qui est justement le fruit de cette union des grains de blé pour produire ce pain. Il en est de même du vin. Il faut aussi unir tous ces grains de la grappe de raisin pour produire le vin. C’est dans cette union que se fait le vin, que se produit le vin. Notre Seigneur a voulu choisir ces éléments précisément pour nous montrer que nous devons être unis, unis pour nous transformer aussi en Notre Seigneur Jésus-Christ.
« Qu’est-ce que votre Dieu vous a laissé ? Il vous a laissé lui-même, Dieu et homme, caché sous la blancheur du pain. Oh feu d’amour ! Ne suffisait-il pas de nous avoir créés à votre image et ressemblance ? Qui vous a forcé à faire ça ? Seulement la charité, aussi fou d’amour que vous êtes » (Sainte Catherine de Sienne. Prières et soliloques 20).