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Homélie pour le 25ème dimanche du temps ordinaire 2018 (JGA)

Les fins dernières : Introduction.

Il est bon de penser aux fins dernières chaque jour et particulièrement en faisant sa prière le matin au réveil, le soir avant le repos, et toutes les fois que nous sommes tentés de faire le mal, parce que cette pensée est très efficace pour nous faire éviter le péché.

Dans notre monde contemporain, la technique, la réussite et l’efficacité sont des valeurs qui s’imposent. Aussi la mort est souvent occultée, parfois même niée de multiples manières. Pourtant la mort fait partie de la condition humaine. Elle nous concerne donc tous. Bien souvent l’homme est devant le mystère de la mort, comme devant une énigme. Depuis toujours, l’être humain s’est interrogé sur l’au-delà. Quand il y a un deuil, on se demande ce qu’est devenu le défunt et quelle relation on peut avoir avec lui. Où est celui que j’aime et qui vient de mourir ? Comment savoir s’il est auprès de Dieu ? L’enfer existe-t-il ? A quoi sert la prière ? Le purgatoire c’est quoi ? Qu’est-ce que le paradis ?

Les réponses apportées sont bien différentes selon les périodes, les lieux et les personnes : négation d’une vie après la mort par incroyance ou par idéologie, croyance en la réincarnation.
La vie prend une physionomie différente selon que nous la considérons comme une promenade ou comme un voyage. Dans le premier cas, nous sommes libres de notre allure et de nos mouvements. Si c’est un voyage, si nous avons un but déterminé et si les conditions mêmes de ce voyage sont telles qu’il doit finir bientôt, peut-être de façon inattendue, et qu’il serait simplement effroyable de ne pas arriver, ne serait-ce pas folie que de cheminer au hasard ?

Or, voici que dans sa bonté, le Seigneur lui-même nous montre le chemin de la vie. Loin de se cacher derrière les nuages du mystère impénétrable. Il a ouvert les Cieux, Il s’est montré. Il parle avec nous et Il est avec nous ; Il vit avec nous. La foi chrétienne apporte une lumière originale et unique sur l’événement de la mort. Pour nous sauver des ravins de la mort, ce divin compagnon a donné sa vie, puis il est allé nous préparer une place dans le Royaume de son Père.

Nous, vos prêtres, souhaitons consacrer quelques semaines, à la lumière de l’Evangile, à la méditation des « fins dernières » : la mort, le jugement de Dieu, l’éternité́ du Ciel et de l’Enfer.
Ce qu’on appelle les « fins dernières » est loin d’être une pieuse légende, il s’agit d’une réalité spirituelle fondamentale qui « dès les premiers temps (…) a influencé les chrétiens jusque dans leur vie quotidienne en tant que critère permettant d’ordonner la vie présente, comme appel à leur conscience et, en même temps, comme espérance dans la justice de Dieu  » (Benoît XVI, Spe Salvi 41).
Le Catéchisme nous apprend que « il est bon de penser aux fins dernières chaque jour et particulièrement en faisant sa prière le matin au réveil, le soir avant le repos, et toutes les fois que nous sommes tentés de faire le mal, parce que cette pensée est très efficace pour nous faire éviter le péché ». Il semble qu’aujourd’hui cette perspective fondamentale soit trop souvent reléguée au second plan.

Nous sommes constitués de deux réalités, l’une matérielle (le corps) et l’autre spirituelle (l’âme). Le Concile Vatican II le souligne très précisément : « Corps et âme, mais vraiment un, l’homme est, dans sa condition corporelle même, un résumé de l’univers des choses, qui trouvent ainsi, en lui, leur sommet, et peuvent librement louer leur Créateur. (…) Ainsi, lorsqu’il reconnaît en lui-même une âme spirituelle et immortelle, (…) il atteint le tréfonds même de la réalité » (Gaudium et Spes 14).
La mort est la séparation de l’âme et du corps comme l’évoque la prière de recommandation de l’âme : « Quitte ce monde âme chrétienne (…). Retourne auprès de ton Créateur qui t’a formé de la poussière du sol. (…) Qu’à l’heure où ton âme sortira de ton corps, Marie, les anges et tous les saints se hâtent à ta rencontre (…) ». 
La foi chrétienne affirme, après la mort, la survivance et la subsistance de l’âme. Le corps tombe d’abord en corruption tandis que l’âme va vers le jugement de Dieu. Elle ne sera réunie au corps ressuscité, que lors du jugement dernier, quand le Christ reviendra dans la gloire. Le Seigneur Jésus annonce les récompenses qui seront dues à chacun selon ses mérites : le Ciel, le Royaume des Cieux pour les justes ; la géhenne de feu, les ténèbres extérieures pour les méchants, là où seront les pleurs et les grincements de dents.

Notre histoire personnelle est orientée vers l’instant de la mort dont nous sommes sûrs qu’il arrivera un jour. Voilà̀ pourquoi le Seigneur, dans l’Evangile, nous rappelle souvent de nous tenir prêts, d’être des veilleurs qui attendent le retour de leur bon Maitre. Au Credo, nous disons chaque dimanche : « j’attends la résurrection des morts et la vie du monde à venir ». L’attendons-nous vraiment ?!… Les premiers chrétiens aimaient à se réunir la nuit pour manifester que l’Eglise attend dans les ténèbres le retour de Celui qui est la Lumière du monde ; les moines et moniales, par l’office de nuit, témoignent en silence de cette amoureuse attente. Il faut donc vivre dans la bienheureuse espérance du Ciel où Dieu a fixé notre destinée, où le Seigneur Jésus rassemblera les élus du Père.
Dans un monde qui marginalise de plus en plus les chrétiens, il faut parfois s’obliger à nous rappeler que la vie chrétienne est la vie normale ! C’est normal de vivre notre vie dans la foi, face à l’éternité, conscients de notre destinée éternelle. Sans ostentation déplacée et sans compromission, mettons en pratique le principe médité par les exercices spirituels de saint Ignace : « l’homme est créé pour louer, honorer, et servir Dieu, Notre Seigneur, et par ce moyen sauver son âme  ». Ou encore l’enseignement de saint Louis Marie Grignon de Montfort : « Je n’ai qu’une âme qu’il faut sauver, de l’éternelle flamme il faut la préserver ».
Sœur Lucie, en 1957, écrivait : « Ma mission n’est pas d’indiquer au monde les châtiments matériels qui arriveront si auparavant le monde ne prie pas et ne fait pas pénitence. Ma mission est d’indiquer à tous l’éminent danger où nous sommes de perdre notre âme à jamais, si nous restons obstinés dans le péché. Chacun doit sauver non seulement son âme, mais aussi toutes les âmes que Dieu a placées sur son chemin ». Ces paroles sont l’écho de toutes les apparitions de la Sainte Vierge. « Un jour, dans le beau Ciel, je vais aller Te voir… »
Cette espérance toujours renouvelée aidait la petite Thérèse de Lisieux à vouloir ce que Dieu voulait pour elle. « Tout est grâce… C’est ce qu’Il aime que j’aime… » : parce que tout mène au Ciel, et doit nous aider à vivre dans « le ciel de notre âme » selon la belle expression de Sœur Elizabeth de la Trinité.

Je termine avec les paroles de Saint Joseph Marie Escriva de Balaguer : « Je dois vous parler du temps, de ce temps qui fuit. Le caractère éphémère de notre vie terrestre devrait plutôt inciter les chrétiens à mieux profiter de leur temps qu’à craindre Notre Seigneur ; moins encore à voir dans la mort une fin désastreuse. En pensant à cette réalité, je comprends très bien les mots que saint Paul adresse aux Corinthiens : tempus breve est ! Quelle est courte la durée de notre passage sur terre ! Ces mots retentissent au plus profond du cœur de tout chrétien cohérent, comme un reproche face à son manque de générosité, et comme une invitation constante à la loyauté. Il est vraiment court le temps que nous avons pour aimer, pour offrir, pour réparer. Il n’est donc pas juste de le gaspiller, ni de jeter de façon irresponsable ce trésor par la fenêtre : nous ne pouvons pas laisser passer cette étape du monde que Dieu confie à chacun ».

Daigne Notre Dame nous obtenir cette grâce.

Sources :

Chanoine Yannick-Marie Escher, http://notredamedesneiges.over-blog.com
Abbé Sylvain Lamerand, http://laportelatine.org
Christiane Hourticq, https://www.paris.catholique.fr/
Saint Pie X, Catéchisme, chapitre 7.
Jose Maria Escriva de Balaguer, Amis de Dieu, 39.
Monseigneur Raymond Centène (introduction au livre “Le Ciel sera si beau”)
Un moine bénédictin, “Le Ciel sera si beau”.


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