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Année 2019- Homélie pour le 29ème dimanche du temps ordinaire. La prière (JA).

L’homme a une belle fonction, celle de prier, d’aimer. Vous priez, vous aimez : voilà le bonheur de l’homme sur la terre. La prière n’est autre chose qu’une union avec Dieu. Dans cette union intime, Dieu et l’âme sont comme deux morceaux de cire fondus ensemble ; on ne peut plus les séparer. C’est une chose bien belle que cette union de Dieu avec sa petite créature.


 

La liturgie de ce dimanche nous offre un enseignement très important sur la nécessité de toujours prier sans se lasser. Il nous arrive parfois de succomber à la fatigue et de nous lasser de prier ; nous avons l’impression que la prière n’est pas utile pour notre vie. Elle nous semble peu efficace. Nous sommes alors tentés de déployer bien plus d’activités et d’employer tous les moyens humains pour atteindre notre but sans recourir à la prière.

Mais Jésus nous enseigne la nécessité qu’il y a à toujours prier. Pour nous faire connaître cet enseignement, il nous livre une parabole. Un juge ne respecte pas Dieu et se moque des hommes. Il agit seulement de manière égoïste et en poursuivant son intérêt. Il ne craint pas le jugement de Dieu ou des hommes. On sait d’ailleurs que, bien souvent, ceux qui ne craignent pas le jugement de Dieu ont bien moins de respect pour les personnes.
Dans cette ville, il y a une veuve, c’est-à-dire une personne qui se trouve dans une situation d’extrême faiblesse et d’impuissance. Dans la Bible, les veuves et les orphelins représentent les personnes les plus faibles, celles qui ne bénéficient plus du soutien de leurs familles et se trouvent sans défense, sans moyens.
Cette veuve va trouver le juge et lui dit : « Rends-moi justice contre mon adversaire ». Mais ses chances d’être entendue sont presque nulles car celui-ci la méprise et elle n’a aucun moyen de faire pression sur lui. Il ne lui est même pas possible de faire appel aux principes religieux car ce juge ne craint pas Dieu. Cette veuve semble donc privée de tous moyens.
Mais elle insiste, elle demande sans se lasser, elle l’importune. Le juge finit par se dire : « Je ne respecte pas Dieu, et je me moque des hommes, mais cette femme commence à m’ennuyer : je vais lui rendre justice pour qu’elle ne vienne plus sans cesse me casser la tête  ».
Tel est le résultat de la prière persévérante et insistante de cette femme… qui n’avait aucune chance !
Jésus ajoute, à cet instant, une réflexion en utilisant un argument a fortiori : si un juge malhonnête fini par se laisser convaincre par la prière d’une veuve, combien plus Dieu qui est un père bon exaucera ceux qui le prient !
Saint Paul (Rom 8, 32) : « [Dieu le Père] Il n’a pas épargné son propre Fils, mais il l’a livré pour nous tous : comment pourrait-il, avec lui, ne pas nous donner tout ? ». Il est la générosité personnifiée, il est miséricordieux et il est donc disposé à écouter les prières. Jésus dit : «  Dieu ne fera-t-il pas justice à ses élus ? ». Nous ne devons jamais désespérer mais toujours insister dans notre prière.

Ce n’est pas la première fois que Jésus parle de la nécessité d’insister et de persévérer dans notre prière. Rappelons-nous aussi cette autre parabole rapportée également par saint Luc… (11,5-8) : l’homme qui au milieu de la nuit va retrouver son ami qui était déjà couché pour lui demander de lui prêter quelques pains, car un autre de ses amis est arrivé à l’imprévu et il n’a rien à lui offrir… Et l’ami qui était déjà couché finit de mauvais gré par lui donner ce qu’il lui demande.
Et Jésus conclut : « Moi, je vous dis : Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira […] Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent !  ».

Pourquoi parfois le Seigneur ne nous exauce-t-il pas immédiatement lorsque nous prions ?
Nous pouvons tenter de donner une réponse à cette question : si chaque prière était immédiatement et automatiquement exaucée, alors Dieu serait transformé en une machine à distribuer, un automate entre les mains des hommes.
Il ne veut pas être un automate, un distributeur mais une personne qui nous communique son amour. Une machine ne peut transmettre aucun amour. Mais lui, il est une personne, il est même une trinité de personnes pleines d’amour et qui veulent transformer le monde par amour. La prière est le moyen d’établir des relations personnelles avec chacun de nous.
C’est de cette façon que le saint Curé d’Ars entendait la prière : « L’homme a une belle fonction, celle de prier, d’aimer. Vous priez, vous aimez : voilà le bonheur de l’homme sur la terre. La prière n’est autre chose qu’une union avec Dieu… Dans cette union intime, Dieu et l’âme sont comme deux morceaux de cire fondus ensemble ; on ne peut plus les séparer… C’est une chose bien belle que cette union de Dieu avec sa petite créature. C’est un bonheur qu’on ne peut comprendre… Nous avions mérité de ne pas prier [à cause de nos infidélités] ; mais Dieu, dans sa bonté, nous a permis de lui parler. Notre prière est un encens qu’il reçoit avec un extrême plaisir. Mes enfants vous avez un petit cœur, mais la prière l’élargit et le rend capable d’aimer Dieu… La prière élève l’âme, fait descendre le Bon Dieu jusqu’à nous ; il se penche vers l’âme qui prie, il lui sourit comme une mère à son enfant qui lui tend les bras. ».
Il est donc parfois amené à nous faire attendre pour que notre prière persévérante renforce notre relation personnelle avec lui. Si nous étions certains d’être subitement exaucés alors nous nous désintéresserions du caractère personnel de notre relation avec lui. Lorsque nous sommes confrontés à la nécessité d’insister dans notre prière, nous nous rendons compte que notre relation avec Dieu est très importante, qu’elle est la chose la plus importante qui soit.
« Celui qui vous a racheté », nous dit saint Jean Chrysostome, « vous enseigne ici ce que vous devez faire. Il ne veut point que vous cessiez de prier, il veut que vous méditiez les bienfaits qui sont l’objet de votre prière […] considérez quel honneur vous est accordé de vous entretenir dans la prière avec Dieu, et de pouvoir lui demander tout ce que vous désirez, car si vous n’entendez pas sa voix, il vous répond cependant par les bienfaits qu’il vous accorde. Il ne dédaigne point vos demandes, il n’en témoigne aucun ennui, votre silence seul lui fait peine » . Notre-Seigneur a voulu ajouter un avertissement à la fin de cet Evangile : « Cependant, le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? », pour nous apprendre que si la foi s’éteint, la prière cesse elle même d’exister.
« Croyons donc pour assurer le succès de nos prières », nous dit saint Augustin, « et prions pour que notre foi ne vienne pas à faiblir. La foi produit la prière, et la prière à son tour obtient l’affermissement de la foi » .

Ainsi soit-il.

Post-Scriptum
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